Pour sa toute première saison au volant d’une Alpine A110 GT4, Francis Dosières à tôt fait de comprendre le maniement de sa nouvelle monture. Rapide, expérimenté, pugnace, la Champenois dispose de sérieux atouts et le démontre une nouvelle fois en terminant la saison à la place de Vice-champion de France Production, et en remportant par la même occasion le Trophée FFSA du Groupe GT Sport.
En 48 ans de course de côte, Francis Dosières a accumulé les titres. Après ses débuts en 1973 en régional au volant d’une BMW 1600, c’est en 1978 que Francis disputait sa première saison sur le Championnat de France avec une Ford Escort. Rapidement, il allait s’illustrer dans l’hexagone avant de s’exporter hors de nos frontières pour savourer de nouvelles consécrations. Champion d’Europe en Catégorie I une première fois en 1985 au volant d’une BMW 635 CSI, puis en 1989, 1990, 1992 et 1993 avec une BMW M3, le Champenois accumulait les titres. Il s’essayait par la suite aux Protos, en s’installant dans le cockpit de Lucchini ou d’Osella. Mais l’achat de son garage et ses activités professionnelles l’incitaient par la suite à mettre la compétition entre parenthèses, avant de retrouver le volant d’une Peugeot 306 Kit-Car pour s’aligner de manière sporadiques sur quelques manches du championnat.
Plus assidu aux débuts des années 2000, Francis se classait en 2004, 2005 et 2006 en tête des voitures de Production au palmarès du Championnat de France. En 2004, une BMW 320 succèdera à la 306, avant d’être remplacée à son tour courant 2010 par une Porsche 997 Cup. Francis aura à nouveau l’occasion de retrouver le volant d’une BMW 320 avant de s’installer en 2013 derrière le volant d’une Seat Leon Supercopa, puis en 2014 d’une Mégane Trophy, jamais vue jusqu’alors en course de côte, et avec laquelle il sera Vice-champion de France en 2015. Suivront les années Supercopa avec la victoire dans le Challenge Open en 2017 et 2020.
Nouveau challenge avec une Alpine A110 GT4
Il n’y a pas d’âge pour se lancer de nouveaux défis. Et même s’il reste le pilote le plus titré évoluant sur le Championnat de France de la Montagne, Francis Dosières est toujours en quête de nouveaux trophées. Après avoir remporté le Challenge Open A/5 en 2020, c’est cette saison au volant d’une Alpine A110 GT4 évoluant en GT Sport qu’il se lançait pour une nouvelle campagne de France.
« Honnêtement, ce n’était pas réellement prévu que je participe au Championnat avec l’Alpine », débute Francis. « Michel Courroye disposait de cette voiture, et plutôt que de la laisser au garage, il m’a proposé de rouler avec histoire qu’elle ne reste pas à végéter dans un coin. C’était également l’opportunité de démontrer sa valeur et par la suite d’essayer de la proposer à la vente. »
Francis avoue que, si la proposition paraissait alléchante, il n’en restait pas moins indécis. Le laps de temps nécessaire pour préparer la saison lui paraissait court, et en homme d’expérience il savait que cela pouvait rapidement s’avérer pénalisant : « Je me doutais que j’aurais pas mal de travail à faire sur la voiture pour qu’elle soit dans les meilleures dispositions pour affronter les épreuves du Championnat. Je savais également que nous ne serions pas nombreux à évoluer dans le Groupe GT Sport. C’est gênant parce que j’aime la bagarre, mais également parce que financièrement, les primes sont divisées par deux. Je perdais également un partenaire, puisque jusqu’alors, en évoluant avec la Supercopa j’étais aidé par le concessionnaire Seat proche de chez moi. Tous ces éléments faisaient que j’étais dans l’expectative. Mais dans le même temps, je n’ai jamais aimé faire dix saisons avec la même voiture, et je me suis dit qu’il était temps de passer à autre chose », reconnait Francis qui ne dédaignait pas non plus de retrouver les sensations que procure une propulsion.
La Course de Côte ayant dans son approche une certaine proximité avec le circuit, Francis savait que cette Alpine, même si elle devait être revue dans son ensemble, ne nécessiterait pas des modifications importantes : « J’avais à l’esprit qu’elle était restée un an sans rouler, et que de ce fait on allait découvrir quelques petits problèmes à résoudre. » Et en premier lieu pas mal de travail de carrosserie, l’Alpine ayant passablement souffert, « j’ai découvert quelques dysfonctionnements, mais le souci majeur provenait des freins. »
Lors de la journée d’essais organisée par Nicolas Schatz sur le circuit du Bourbonnais, Francis ne sera pas en mesure d’aligner un seul tour de piste : « Avant même d’avoir bouclé le premier tour, les freins se sont bloqués et nous avons passé la journée à faire de la mécanique sans trouver de solutions. » De retour chez lui, Francis changeait les maîtres cylindres et effectuait une nouvelle séance d’essais qui s’avérait concluante. « Mais trois jours avant La Pommeraye, je suis retourné en circuit, et cette fois c’étaient les freins arrière qui nous ont créé des problèmes. A ce stade, je ne savais pas si je serais en mesure de prendre part à la manche d’ouverture du Championnat. »
Au volant d’une auto qu’il découvrait, Francis savait que la saison pouvait s’avérer difficile. Face à Anthony Dubois, plus expérimenté au volant de son Alpine, le pilote aubois savait qu’il serait difficile de contester la victoire en GT Sport , « mais j’espérais être en mesure de me battre pour le podium du championnat. »
Première course… Premier podium !
Avant de rejoindre La Pommeraye, Francis avait pris soin de changer à nouveaux quelques pièces sollicitées dans l’emploi des freins, mais sans la certitude que tout allait fonctionner. La première montée d’essais se déroulait sans problème et laissait envisager un excellent week-end, avant que, sur la seconde montée, l’embrayage de l’Alpine ne lâche : « Dans mon esprit c’était la fin du week-end. J’étais sur le point de recharger la voiture et de rentrer à la maison. Mais mon frère m’a incité à démonter et à tenter de réparer. Nous avons bien fait, puisque grâce à une aide providentielle qui a accepté de nous usiner les pièces nécessaires pour la réparation, nous avons pu repartir. Je termine sur le podium, c’était totalement inattendue », avoue Francis que l’on retrouve au troisième rang, deuxième du GT Sport.
La Pommeraye fera également prendre conscience à Francis Dosières que, par rapport à son adversaire direct dans le GT Sport, son Alpine semblait disposer de rapports de boîte beaucoup plus longs : « N’ayant pas une connaissance parfaite de la réglementation, je ne savais pas exactement ce que j’avais le droit d’intégrer sur la voiture. Serge Pegolotti (responsable des commissaires techniques sur le championnat, ndlr) m’a appris qu’il allait nous autoriser des boîtes libres. De ce fait j’ai commandé des rapports de boîte pour les courses à venir, et j’ai pu les monter pour Dunières. »
Le début de saison allait être synonyme de réussite pour Francis Dosières qui à Vuillafans se classait au deuxième rang et remportait le GT Sport : « Je dois ma position à l’abandon de Ronald. S’il avait pu terminer je pense que j’aurais dû me contenter de la troisième place », analyse Francis. « Pour le reste, j’ai pu découvrir le maniement de l’Alpine sous la pluie et me rendre compte qu’elle était très efficace sur tous les terrains. Ce qui m’a le plus étonné avec l’Alpine c’est sa motricité quel que soit le niveau d’adhérence. On a presque le sentiment d’évoluer avec une quatre roues motrices. »
A Dunières, un problème d’ABS allait contrarier l’évolution de Francis qui, malgré ce souci, accrochait la deuxième place du GT Sport en terminant cinquième du Production : « C’était un problème de capteur, que nous n’avons pas pu solutionner. Heureusement, dimanche, nous avons évolué sur une route sèche, et le problème d’ABS m’a moins pénalisé que si nous avions dû rouler sous la pluie. »
Marchampt allait permettre à Francis de confirmer un doute que son entourage avait depuis le début de saison, à savoir des différences sur le moteur des deux Alpine évoluant sur le championnat. « Les bruits émis par les deux A110 étant différents, on pouvait légitimement penser que les moteurs affichaient des différences. On s’est alors rendu compte qu’Anthony disposait du ’’bang’’ alors que je ne l’avais pas. » Pour rappel, le ’’bang’’ est une technique de gestion du moteur qui a pour but de minimiser les temps de latence turbo. « Finalement, j’étais fautif parce que j’ignorais que ma voiture disposait du même système mais qu’il y avait une manipulation que j’ignorais pour le mettre en fonction. » En l’absence de ’’bang’’, Francis se classait une nouvelle fois cinquième, et deuxième du GT Sport.
Freins en état de marche, boite adaptée, ’’bang’’ en fonction, c’est confiant que le Champenois se rendait au Mont-Dore, sur un tracé qu’il apprécie : « Mais là je suis passé à côté de mon week-end, et je pense que ça vient de moi. Il n’y avait rien d’anormal sur la voiture, mais les chronos étaient loin de mes attentes. Je n’ai pas compris, je suis juste passé à côté. »
Chamrousse étant programmé cette année une semaine après le Mont-Dore, Francis Dosières cherchait en vain un circuit sur lequel il aurait pu faire quelques essais pour s’assurer que tout fonctionnait sur son Alpine : « N’ayant pas pu rouler, j’avais quelques doutes avant de me rendre à Chamrousse, mais finalement tout s’est bien passé. J’étais en tête du GT Sport à l’issue du essais, et finalement je termine le dimanche dans le sillage d’Anthony, je n’étais pas largué comme au Mont-Dore et c’était plutôt rassurant. »
A Turckheim, où il termine cinquième en remportant le GT Sport, Francis avoue ne pas être réellement satisfait de ses chronos : « Je n’arrivais pas à rééditer les temps réalisés lors de la précédente édition avec la Seat. Je sais qu’en 2020 j’avais signé un nouveau record du groupe, mais tout de même, avec l’Alpine je devais être mieux que ça », explique Francis qui en compétiteur acharné est, comme il l’avoue lui-même, un éternel insatisfait. « Je suis plus attaché au chrono qu’à la place. Je préfère terminer deuxième et signer un belle performance que de gagner en ayant le sentiment de ne pas avoir fait de mon mieux. » L’épreuve alsacienne privait Francis de son principal adversaire. Anthony Dubois sortait de la route et endommageait passablement son Alpine, ce qui mettait un terme prématuré à sa saison.
A Limonest, Francis allait terminer sa campagne de France en beauté en se hissant une nouvelle fois sur le podium et en signant un nouveau succès en GT Sport : « C’est bien, mais je pense que l’auto avait le potentiel pour aller chercher la deuxième place », confie Francis, confirmant qu’il est effectivement un éternel insatisfait. « Je n’affectionne pas spécialement le tracé de Limonest, mais il ne tenait qu’à moi à me battre pour gagner une place. »
Ses performances sur le Championnat de France de la Montagne qualifiaient d’office Francis Dosières pour les FIA Hill Climb Masters. Mais le Champenois préférait décliner l’invitation : « Mon emploi du temps ne me permettait pas de consacrer une semaine pleine à un tel déplacement. De plus, aller au Portugal représente un budget important, et en termes de résultats, il était difficile de faire des pronostics ne sachant pas dans quelle catégorie allait évoluer ma voiture. »
Vice-champion et vainqueur du Trophée du GT Sport
Vice-champion de France de la Montagne, Francis Dosières remporte à l’issue de cette saison 2021 le Trophée FFSA du Groupe GT Sport. Des titres qui lui permettent d’étoffer un peu plus un palmarès des plus imposants : « Le bilan est largement positif compte tenu des problèmes que nous avions en début de saison. J’ai retrouvé le plaisir de rouler avec une propulsion, et même si je ne regrette pas les saisons avec la Supercopa, il est évident que le pilotage d’une Alpine disposant d’une vraie boîte de vitesses est réellement plus plaisant », confie Francis. « Mais dans mon esprit, il est clair que si je termine deuxième du championnat, ce n’est pas réellement mérité. A mon sens Anthony aurait dû être devant. Alors il est clair que sa sortie de route fait partie intégrante de la course, mais c’est dommage que ça se termine comme ça. »
La saison de Francis Dosières fut parfois compliquée mais lui permet une nouvelle fois de s’illustrer et de partager ses succès avec ses soutiens : « Je remercie tous ceux qui ont été à mes côtés. En premier lieu Jeannot (Natter), mon fidèle mécano, mon frère Marc, Evan le jeune mécanicien qui travaille chez moi, Jordan mécano sur les courses, Régis et Anne-Marie (Court), mon épouse Claudine, ma fille Juliette, Michel (Courroye) qui m’a prêté cette Alpine. Merci à mes partenaires, Yacco, Michelin, Bafti Nerguti et la société MEP (Manosque Electricité Plomberie). »
Francis Dosières ne sait pas encore réellement de quoi sera faite la saison 2022 : « Tout dépendra des modifications qui pourraient être apportées à la réglementation en ce qui concerne les Alpine. Nous sommes en attentes de savoir s’il y a statu quo, ou si l’on opère à des changements qui à mon sens priveraient les plateaux des courses de côte nos Alpine. Si les choses restent en l’état, il y a de fortes chances pour que je reparte sur une saison complète avec la même voiture, dans le cas contraire, je ne sais absolument pas ce que je ferai… Changer de voiture ou ne plus rouler ! »
Propos recueillis par Bruno Valette ©
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