La lutte pour la suprématie en groupe A a rarement été aussi disputée. Deux pilotes venus du Sud se battent cette année à coup de millièmes de secondes, et font régulièrement tomber les records établis les années précédentes dans la catégorie. Ce face à face, entre la Seat Léon Supercopa de Ronald Garces et la Mitsubishi Lancer de Guillaume Plan, crée une saine émulation entre les deux pilotes qui signent des performances de tout premier ordre, se classant régulièrement aux premières places du classement Production.
A quatre épreuves de la fin de saison, les jeux restent ouverts même si Guillaume Plan a connu quelques mésaventures qui le privent d’éventuels jokers pour la suite du championnat.
Le sport auto, une passion familiale
Issue d’une famille de passionnés de sport automobile, dont plusieurs membres ont assouvi cette passion par le biais du pilotage, Guillaume Plan a toujours baigné dans l’environnement des vrombissements de moteurs sur-vitaminés. Jean-Louis, son père, fut lui-même pilote en son temps. C’est tout naturellement, alors que Guillaume venait de fêter ses 12 ans, qu’il l’installa derrière le volant d’un karting afin de lui faire découvrir les sensations incomparables que procure le pilotage.
Guillaume a toujours été bercé dans l’univers du sport auto.
Cette activité, à la base ludique, allait rapidement se transformer en vraie passion, et le Karting en Formule Ford : « J’avais 16 ans lorsque mon père m’a proposé de délaisser le karting pour découvrir le circuit par le biais de la monoplace », se souvient Guillaume. « Je roulais alors en loisir, jusqu’au jour où, Maurice Dumas, le père de Romain, estimant que j’avais un vrai potentiel, m’a incité à rouler en course de côte. » Un choix dicté par le fait que, parmi les disciplines que compte le sport auto, la Montagne est certainement la moins onéreuse et la moins chronophage.
En 2010, Guillaume, toujours avec le soutien de son père, fait l’acquisition d’une Peugeot 106 16S au volant de laquelle il fera ses premières armes en course de côte. L’année suivante, le jeune gardois s’engageait sur le Championnat de France de la Montagne dans le cadre du Challenge Espoir. Une participation qui se soldait par une troisième place finale.
La 106 est certes une voiture idéale pour débuter, mais avec laquelle il est difficile de prétendre à des résultats probants. Guillaume décidait donc de se séparer de sa petite Peugeot pour faire l’acquisition d’une auto à la cavalerie nettement plus impressionnante : « Mais j’ai connu quelques difficultés pour vendre la 106, et de ce fait j’ai dû me résoudre à prendre une paire de saisons sabbatiques avant de retrouver la compétition. »
Guillaume mettait à profit cette transition pour prendre part, toujours au volant de sa 106, au Rallye de Bagnols-Les Bains : « Ce fut une belle expérience, même si j’ai disputé cette épreuve avec une boîte de vitesses de série et un copilote qui n’était pas totalement en confiance », reconnait-t-il. « L’objectif était de rejoindre l’arrivée, et au final nous terminons quatrième de classe. »
La 106 pour débuter, la Mitsubishi pour confirmer
A la recherche d’une auto compétitive pour son fils, Jean-Louis Plan fait le tour des annonces et découvre sur internet une Mitsubishi Lancer à vendre. Sur cette annonce figurait le nom de Toto Wolff, ce qui allait immédiatement l’interpeler : « Mon père en a parlé à Romain Dumas qui connaissait Toto Wolff, qui n’est autre que le directeur de Mercedes Grand Prix. Romain a joint Toto Wolff au téléphone, et quelques jours après, le père de Romain, mon père et moi-même, étions à Vienne, en Autriche, pour faire l’acquisition de cette voiture. »
Avec la Mitsu, Guillaume sait disposer d’une arme redoutable en groupe A.
Deux semaines plus tard, Guillaume Plan se présentait au départ de la Course de Côte de Bagnols-Sabran, première manche du Championnat de France 2014, avec une Mitsu chaussée de pneus pluie, et équipée d’amortisseurs de rallye : « Nous avons mis à profit cette année 2014 pour parfaire les réglages de la Mitsubishi. La voiture venait du rallye, et nous devions la reconfigurer pour la côte. Durant cette saison, j’ai pris part aux courses de côte de Bagnols-Sabran, du Col Saint Pierre, de Gémenos, du Mont-Dore et de Chamrousse. »
Des participations qui ont permis de faire évoluer la Mitsubishi, même si Guillaume reconnait qu’il reste encore aujourd’hui une somme de travail à réaliser pour parfaire les réglages de la belle. Mais même si la Lancer n’est pas encore trouvé sa configuration optimale, elle se présente comme une arme redoutable, capable de jouer les premiers rôles en Championnat Production : « Le changement de réglementation qui, en 2015, permet de débrider les japonaises en groupe A, m’a incité à m’engager sur le Championnat de France de la Montagne », avoue Guillaume. « A l’étude des chronos réalisés précédemment, il paraissait légitime de prétendre remporter des succès en groupe A, et pourquoi pas tenter de jouer la victoire de groupe au championnat. »
2015 : Objectif le trophée de groupe
Pour mettre le maximum de chances de son côté, Guillaume allait établir un calendrier comprenant l’ensemble des épreuves du Championnat de France de la Montagne. C’est donc à Bagnols-Sabran, sur la manche d’ouverture de la saison, que l’on retrouvait la Mitsubishi pour son premier rendez-vous 2015 : « C’est une épreuve qui me laisse des souvenirs mitigés », reconnait l’Alésien. « J’étais en tête avant la dernière montée. En me calquant sur les chronos réalisés l’année précédente par David Dieulangard, j’estimais avoir suffisamment d’avance pour être assurer de la victoire, et j’ai décidé alors de monter des pneus déjà usagés. Mais Ronald (Garces) améliore en battant le record du groupe. Je termine deuxième à trois dixièmes, ce qui est un excellent résultat, mais qui s’avère un peu frustrant quand tu penses que la victoire est quasiment acquise. »
Sa participation à Bagnols-Sabran lui permettra de prendre conscience que sa Mitsubishi est capable de lui offrir de très bons résultats, mais également que Ronald Garces sera cette saison un adversaire de taille au volant de sa Seat Léon Supercopa.
Après Bagnols, c’est sur le Col Saint-Pierre, son épreuve à domicile, que le Gardois allait défier Ronald Garces et les Montagnards européens. Au final, Guillaume était devancé par son rival, mais parvenait à signer de meilleures performances que certains pilotes européens : « J’avoue que ma plus grande satisfaction vient du fait que je suis devant des pilotes étrangers qui disposent de Mitsubishi dont les réglages sont optimisés, ce qui n’était pas mon cas. Ils bénéficient de plus d’une réglementation européenne avantageuse par rapport à la nôtre, et parvenir à les devancer fut vraiment motivant. »
Aux Beaujolais, Guillaume a été trahi par la mécanique.
Comme sur le Saint-Pierre, à Abreschviller, Guillaume Plan accrochait la sixième place du classement Production. Mais une différence de taille marquait la course du Gardois ; cette fois, c’est lui qui s’imposait en groupe A : « Une première victoire a toujours un goût particulier, d’autant que je m’impose avec trois secondes d’avance sur Ronald et deux sur Bruno Fra », rappelle-t-il. « L’épingle sur le tracé d’Abreschviller a certainement joué en ma faveur, mais sur les portions plus rapides, mes adversaires ont logiquement l’avantage. »
Si la Lorraine permettait à Guillaume de briller, lors de son escapade normande sur la Course de Côte d’Hébécrevon, il ne connaissait malheureusement pas la même réussite. Victime de deux tête-à-queue dont la Mitsubishi laissait entrevoir les stigmates, Guillaume parvenait tout de même à accrocher la troisième place du groupe A : « Au fil des courses, je maîtrise de mieux en mieux ma voiture. De ce fait, je l’exploite de plus en plus et j’augmente la cadence. Mais j’en arrive au point de trouver la limite dans les réglages, qui ne sont pas encore parfaits. Dès que je franchis cette limite, la voiture se dérobe et je pars à la faute. C’est dans ces situations qu’apparaissent les défaillances de réglages. »
Suite à sa mésaventure normande, Guillaume prenait part à une journée de tests sous les conseils avisés de Romain Dumas : « Cela m’a permis d’effacer une partie des problèmes et de retrouver la confiance avant de me rendre à La Pommeraye. » Un regain de confiance qui sera payant… Pour 172 millièmes, Guillaume imposait sa Mitsubishi en tête du groupe A : « Parvenir à l’emporter sur un parcours rapide, confirmait le gain des nouveaux réglages apportés par Romain », analyse Guillaume. « Ce succès, glané juste après Hébécrevon, a fait du bien au moral. »
Un calendrier complet et une inscription au Challenge Elite pour le pilote alésien.
A Saint-Gouëno, Guillaume Plan terminait deuxième du groupe, derrière Geoffrey Bouhin, mais 53 millièmes devant Ronald Garces. Mais ce que retiendra avant tout le pilote de la Mitsubishi, ce sont les circonstances particulières dans lesquelles il a abordé le rendez-vous breton : « Nous avons roulé toute la nuit pour nous rendre à Saint-Gouëno. Nous sommes arrivés le samedi matin, et je n’avais pas dormi de la nuit. Je n’ai pas eu l’occasion de reconnaitre ce parcours que j’ai découvert pour la première fois au volant de la Mitsu », se souvient Guillaume. « C’est très rapide, avec des passages à l’aveugle, ce qui n’était pas évident pour une première. Par chance, la pluie du dimanche m’a offert un petit avantage qui m’a permis de terminer devant Ronald, malgré une boîte de vitesses qui donnait déjà des signes de fatigue. »
Des signes précurseurs qui allaient se confirmer au Beaujolais, où Guillaume sera trahi par la mécanique, samedi, lors de la journée d’essais : « Lors d’une ré-accélération, la boîte a rendu l’âme. Les pignons étaient en fin de vie, ce qui m’a valu une casse de boîte de vitesses et de boîte de transfert », explique-t-il. « C’est d’autant plus dommage que je connaissais bien le tracé du Beaujolais, et que ce parcours convient bien à la Mitsubishi. »
Pour tenter de faire oublier sa déconvenue du Beaujolais, Guillaume Plan attendait de pied ferme le rendez-vous de Vuillafans. Deuxième à 594 millièmes de Ronald Garces à l’issue de la deuxième montée, l’Alésien espérait bien mettre à profit l’ultime confrontation pour devancer son adversaire : « Je dois reconnaitre que nous avons commis une erreur de stratégie le dimanche matin. Lorsque j’ai débriefé ma première montée, que j’ai pu voir les erreurs commises, je me suis rendu compte que je pouvais nettement améliorer mon chrono. Même si la troisième montée n’était pas la plus rapide, je pouvais à mon avis aller chercher Ronald. » L’annulation de la troisième montée allait compromettre ses plans, et obliger Guillaume à se satisfaire de la deuxième place.
Ce week-end des 18 et 19 juillet, c’est à Dunières que l’on retrouvera Guillaume Plan. Une épreuve que le Gardois attend avec une certaine impatience : « C’est un tracé assez technique, sur lequel l’adhérence est précaire. Des éléments qui conviennent tant à la Mitsubishi qu’à moi-même. Je pense que sur ce parcours je peux tirer avantage de mes quatre roues motrices. »
Mitsu, Norma, Porsche… Quel avenir pour Guillaume ?
Pour ce qui est de la fin de saison, Guillaume veut toujours croire en ses chances de terminer au sommet de la hiérarchie du groupe A, même s’il sait que cet objectif sera à présent difficile à réaliser : « La casse de la boîte au beaujolais, et l’annulation de la dernière montée à Vuillafans rendent la tache compliquée », avoue-t-il. « Mais on ne sait jamais comment peuvent évoluer les choses. Il faut toujours garder bon espoir. »
Guillaume Plan sera certainement l’un des pilotes à suivre dans les années à venir.
Le pilote alésien, qui fêtera ses 30 ans à la fin de ce mois, avoue ne pas vraiment savoir de quoi sera fait l’avenir. Conscient que sa Mitsubishi dispose encore d’un potentiel à exploiter, il aimerait bien l’amener plus haut encore : « Bien évidemment, mon souhait serait de repartir sur une nouvelle saison en Championnat de France de la Montagne. Toutefois, je sais que cela nécessite de disposer de temps et d’un budget. Nous verrons durant l’hiver comment vont évoluer les choses et de quels soutiens nous pourrons disposer. »
La pause hivernale devrait également permettre à Guillaume Plan de prendre part à une séance d’essais au volant d’une Norma 2 Litres prêtées par Norbert Santos : « L’issue de ces essais pourrait déterminer des choix pour l’avenir. Mais à ce jour, mon rêve serait de courir au volant d’une Porsche Cup en GTTS. » Il est vrai qu’en la matière, Guillaume connait très bien un préparateur alésien qui a fait largement ses preuves.
Guillaume Plan est un garçon attachant. D’ailleurs les Montagnards les plus expérimentés ont pris en affection ce jeune pilote talentueux, et n’hésitent pas à lui prodiguer de nombreux conseils : « Des pilotes comme Michel Lamiscarre, Pascal Cat, Cyrille Frantz me font largement profiter de leurs expériences. Ils n’hésitent pas à me prêter leurs caméras embarquées pour m’aider à mieux cerner les subtilités du terrain. Je profite de l’occasion qui m’est donnée pour les remercier. Tout comme je remercie Bruno Fra, qui a toujours fait preuve d’une réelle sympathie à mon égard, et qui n’est jamais avare de conseils. »
Au titre des remerciements, Guillaume ne peut oublier Romain Dumas et son père : « Ce sont des amis, et c’est toujours avec le plus grand des plaisirs qu’ils me font profiter de leur immense expérience. » . D’autres encore ont contribué à la réussite du projet mis en place par Guillaume et son père : « Durant l’intersaison, j’ai pu bénéficier du coaching de Jérôme Vergerpion, qui m’a préparé à aborder le championnat et qui nous a mis en relation avec Soben, le fabricant d’amortisseurs. Là, Benjamin Talon et Frédéric Massy ont fait un travail remarquable sur les amortisseurs. Par la suite, grâce à Brice Gaillardon, le dirigeant de Gaillardon Racing Service, nous avons pu affiner les réglages, pour amener la Mitsubishi à une configuration spécifique à la course de côte… Grâce à l’implication de chacun d’entre eux, nous avons pu mener à bien notre projet, et je les en remercie. »
« Je n’oublie pas Renaud Martel, qui a fait un travail spectaculaire sur la voiture après mon tête-à-queue à Hébécrevon. Mes plus sincères remerciements également à toute l’équipe proche de moi, qui a rendu possible la réparation rapide de la boîte à vitesse après la course du Beaujolais », conclut Guillaume.
Propos recueillis par Bruno Valette