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Jouer les premiers rôles sur le Championnat de France de la Montagne nécessite de disposer d’une bonne dose de talent. Le faire au volant d’une voiture de sa conception requiert bien d’autres qualités. C’est le défi que relève depuis plusieurs saisons Fabien Bourgeon, un pari audacieux largement empreint de réussite.
On ne présente plus la structure Bourgeon Concept qui en l’espace de quelques années a acquis une réputation qui a très largement dépassé les frontières de l’hexagone. Dan et son fils Fabien peuvent s’enorgueillir d’avoir mis à disposition de bon nombre de pilotes des TracKing qui leur ont permis d’enrichir leurs palmarès de nombreux succès en CM. Fabien lui-même a eu l’occasion de s’illustrer en remportant en 2017 et 2018 le Challenge Open CM sur le Championnat de France de la Montagne.
Et si aujourd’hui les TracKing représentent une part importante des plateaux dans la classe CM, Dan et Fabien ont décidé de passer à la vitesse supérieure, non pas en mettant un terme à la fabrication des TracKing, mais en ajoutant au catalogue de Bourgeon Concept une nouvelle voiture, la Revolt… Homologuée dans le groupe E2-SC, la nouvelle monture conçue par la famille Bourgeon est destinée à jouer les premiers rôles sur le championnat. D’ailleurs Fabien a eu l’occasion de démontrer la valeur de sa Revolt 3P0 en s’imposant en 2020 sur la Course de Côte de Bagnols-Sabran.
Un succès qui motivait la structure de l’Ain a faire mieux encore et à présenter pour la saison 2021 une Revolt 2P0 propulsée par un moteur 1175 cm3 turbocompressé. Un nouveau modèle plus performant et plus léger qui devait animer la classe E2-SC/2. Malheureusement tout n’allait pas se dérouler comme prévu : « Durant toute l’intersaison nous avions fait un gros développement sur une nouvelle auto, en partant du principe initial qu’avec l’application d’une bride sur les moteurs turbo, décidée par la FIA, il était judicieux d’intégrer la classe E2-SC/2. Dans notre esprit, avec un 1.2 litre turbo nous estimions qu’il était possible de rivaliser face à des 3 litres bridés ou à des moteur V8 », débute Fabien Bourgeon. « Nous voulions donc débuter la saison avec cette nouvelle voiture histoire d’en assurer le développement. »
La saison en Revolt 3P0 V8
Malheureusement, un souci de couple conique sur la boite de vitesses mettait un frein à l’avancement du projet : « Nous étions confrontés à un problème avec une pièce dont il est très difficile de disposer dans de courts délais. Ça compromettait de ce fait notre saison. » Dan et Fabien devaient donc se résoudre d’une part à faire l’impasse sur La Pommeraye, manche d’ouverture de la saison 2021, et à remettre la Revolt 3P0 sur ses roues à la veille de Vuillafans : « Nous avons donc relancé le V8 sans avoir préalablement fait le moindre kilomètre d’essais en circuit. Il a fallu travailler sans relâche pour réviser la voiture avec laquelle je roulais l’année précédente et nous présenter à Vuillafans bien fatigués », confie Fabien.
Le pilote de l’Ain n’était donc pas dans les meilleures dispositions pour débuter le championnat. Affecté moralement par la frustration de ne pas aligner sa nouvelle monture, il devait revoir ses prétentions à la baisse : « Certes on savait que l’auto était compétitive, la victoire à Sabran l’avait démontré, mais nous étions conscients que sur certains tracés, face à Geoffrey (Schatz), Damien (Chamberod) et Cyrille (Frantz) qui disposaient de moteurs turbos, il allait être difficile de concurrencer. Il faut garder à l’esprit que l’on accuse un déficit de puissance de l’ordre d’une centaine de chevaux, ce qui ne permet pas de faire des miracles. L’idée initiale était donc de poursuivre le développement du châssis et d’espérer que dans certaines circonstances, notamment avec l’aide de la météo ou sur des tracés qui nous sont favorables, nous pourrions nous mettre en valeur. Les prétentions se cantonnaient à cela. »
Pour Fabien Bourgeon les choses étaient claires, ce n’est pas en 2021 qu’il irait chercher un titre de Champion de France : « Nous sommes en concurrences avec des adversaires particulièrement affutés, qui dispose de voitures compétitives avec lesquelles ils évoluent depuis plusieurs saisons. De notre côté nous sommes en phase de développement, l’approche n’est donc pas la même. »
Une succession de podiums
Perturbé par la lourde charge de travail nécessaire à la remise en route de la Revolt 3P0, frustré par le fait de ne pas disposer de sa nouvelle monture, Fabien Bourgeon n’abordait pas Vuillafans dans le meilleur état d’esprit. Et sa prestation sur l’épreuve Franc-Comtoise sera marquée par un nouveau souci : « J’ai connu un problème de batterie sur la deuxième montée, et j’ai été gêné bien involontairement par Billy (Ritchen) qui a connu sensiblement le même problème que moi. Avec la batterie HS, j’ai rapidement cherché un endroit pour stopper la voiture afin de ne pas perturber les montées de Cyrille et Geoffrey qui s’élançaient derrière moi. » La pluie fera par la suite son apparition, « et de ce fait le classement était scellé et je dois me contenter de la quatrième place alors que dans mon esprit le podium était jouable. Je repars frustré de Vuillafans. »
A Dunières, Fabien se voyait proposer un duel face à Damien Chamberod qui finalement le devançait sur la dernière montée pour terminer au cumul des deux meilleurs chronos, trois dixièmes devant la Revolt : « On arborait la nouvelle livrée jaune sur le Revolt à Dunières, et le week-end a été bon dans l’ensemble. Malheureusement, sur la dernière montée, l’issue de la course a changé et le podium nous échappe.», se souvient Fabien. « Nous pensions que le tracé de Dunières conviendrait mieux au V8, et sincèrement nous espérions être un peu plus dans le match. Finalement je repars de Dunières avec le sentiment d’avoir vraiment raté le début de saison... »
Licencié à l’ASA Beaujolais, Fabien espérait beaucoup de sa prestation à Marchampt, il ne sera pas déçu puisqu’il accrochait la deuxième place derrière le champion en titre, Geoffrey Schatz : « C’est une énorme surprise et un excellent week-end. Sur ce tracé, on s’attendait à énormément ’’ramasser’’ et à subir. Il a fallu attaquer avec Damien et Billy qui poussaient forts, mais au final c’est payant et particulièrement réjouissant. »
Fabien Bourgeon et Damien Chamberod poursuivaient leur confrontation sur les pentes du Mont-Dore. Et si au final l’Isérois termine au deuxième rang, le pilote de la Revolt se hisse sur le podium en accrochant la troisième place : « J’en garde un excellent souvenir. Faire une montée en 2’12’’ alors que l’on était en 2’18’’ en 2020, c’est une fabuleuse progression. On signe là la deuxième performance d’un V8 sur le Mont-Dore derrière Christian Merli, pour la seconde année de la voiture. J’ai compris à ce moment-là que l’auto avait vraiment un énorme potentiel mais également que je me sentais très bien à son volant. »
A Chamrousse, Fabien Bourgeon venait défier Damien Chamberod sur ses terres, et c’est uniquement sur la troisième montée que l’Isérois parvenait à devancer le pilote de l’Ain, que l’on retrouve une nouvelle fois sur la troisième marche du podium : « On ne se faisait guère d’illusions. Avec l’altitude, à notre déficit d’une centaine de chevaux s’ajoutait la perte d’une soixantaine de chevaux supplémentaires. En temps normal il est déjà difficile de se battre avec Geoffrey et Damien, alors avec 150 chevaux de moins, ça devient très compliqué… Mais on a fait au mieux et je suis à ma place. »
Fabien Bourgeon allait prendre une belle revanche à Turckheim où il plaçait sa Revolt 3P0 à la deuxième place : « Comme à Marchampt, on pensait ’’déguster’’ sur ce tracé très rapide, et au final on est très bien et c’est vraiment une belle satisfaction… » La saison de Fabien sur le Championnat de France de la Montagne se concluait à Limonest par un dernier podium : « On espérait être bien puisqu’on pensait que le tracé sinueux conviendrait bien au Revolt V8. Mais j’ai toujours du mal à performer à Limonest, et cette année n’a pas échappé à la règle. Finalement, quand on regarde en arrière, nous sommes un peu ’’largués’’ sur les courses ou nous espérions être compétitifs, comme à Dunières et Limonest, et performants sur des tracés rapides où on pensait ’’ramasser’’. En fait, nous sommes pénalisés par notre manque de puissance sur les relances. »
Si la Revolt a mis à profit cette saison 2021 pour s’illustrer sur les épreuves du Championnat de France de la Montagne, elle n’avait pas eu jusqu’à ce jour l’opportunité de se mettre en valeur en dehors de nos frontières. Une lacune qui allait être comblée à l’occasion des FIA Hill Climb Masters. A Braga, face à l’élite de la discipline, Fabien accrochait la septième place au scratch, la quatrième de la Catégorie 2 et à nouveau sur le podium du E2-SC : « Ça a nécessité une grosse préparation, mais ça en valait la peine parce que ça nous laissera de fabuleux souvenirs. C’est une totale réussite tant pour les performances que pour le fait d’avoir pu faire découvrir notre voiture à un nouveau public, particulièrement passionné. Face à des pilotes européens affutés comme jamais je pense que nous avons pu démontrer la compétitivité de la Revolt. »
Cerise sur le gâteau, Fabien Bourgeon était intégré à l’équipe de France qui remporte sur ses FIA Hill Climb Masters la Coupe des Nations : « Ca me rappelle les bons souvenirs du Trophée Lestienne que j’avais remporté grâce au plus petit écart. Et là encore je réalise un écart de trois centièmes entre mes deux meilleurs résultats, Ronald (Garcès) un centième et pour le coup l’équipe de France était quasiment imbattable. »
Troisième du Championnat !
A l’heure de faire le bilan, Fabien Bourgeon ne peut être que satisfait de terminer sur la troisième marche du podium du Championnat de France de la Montagne : « Nous sommes parvenus à ’’chiper’’ la troisième place du Championnat à Kevin (Petit) à Limonest, et terminer sur le podium est une belle satisfaction. Il faut garder à l’esprit qu’initialement je ne devais pas courir avec cette voiture mais avec un nouveau modèle, donc nous sommes clairement à notre place et le bilan est hyper positif. J’ai vraiment eu le sentiment de progresser et de pouvoir exploiter de mieux en mieux la voiture, même si je n’en tire pas encore tout le potentiel. Mais je suis vraiment bien à son volant, et finalement je n’ai aucun regret d’avoir disputé cette saison 2021 avec le V8. Avec le recul, c’est je pense ce qui était le mieux pour nous. Lorsque je fais le comparatif sur les deux courses que nous avons courues en 2020 avec la même voiture – le Mont-Dore et Turckheim – j’ai pu mesurer la nette progression, c’est très enrichissant. »
Jouer les premiers rôles sur le championnat au volant d’une voiture de sa conception demande un énorme investissement, notamment humain. Et Fabien n’oublie pas tous ceux qui s’impliquent dans l’aventure : « Je tenais à remercier du fond du cœur tout « l’écosystème » qui gravite autour de moi et qui me permet, non pas seulement de rouler, mais aussi construire ma voiture. Je pense bien évidemment à mon sponsor historique Borrelly Spring Washers, mais aussi mon oncle, Jief, et les sponsors qui nous ont rejoint cette année, Salber Recyclage et Bolloré Logistique. J’ai aussi une pensée toute particulière pour mon équipe, qui s’est donné à 100% pour disposer d’une voiture au top, le travail abattu est colossal, et on peut vraiment être fier de nous… Et un peu en avance, je remercie ma petite équipe projet 2022, parce qu’on est en plein dedans, et je peux vous dire que ça se donne à 100% la aussi ! »
En 2022, Fabien Bourgeon retrouvera l’habitacle de la Revolt 3P0, mais la belle bénéficiera d’une nouvelle motorisation : « Fini le V8, on a fait le choix du moteur turbo, comme les copains. Mais parvenir au bout du projet n’est pas facile. Trouver un motoriste capable de fournir un moteur dans les délais est très complexe, et finalement nous avons fait le choix de développer notre propre moteur. Mi-décembre nous avons trouvé une base moteur qui se présente comme totalement innovante sur le Championnat de France, et nous travaillons à présent à son développement en interne. Cela nous permet de mieux maîtriser l’ensemble des paramètres et à terme de proposer une voiture 100% BOURGEON Concept. Mais c’est à nouveau un challenge compliqué à relever et je tiens à remercier les gens qui nous entourent, qui croient en nous et qui nous apportent leur aide. Nous allons nous retrouver à armes égales avec Geoffrey, Damien, Cyrille… et l’ambition est de se battre non seulement pour des podiums, mais également pour des victoires. »
Quid de la Revolt 2P0 ? Elle ne restera pas au garage puisque c’est entre les mains de la Championne de France, Cindy Gudet qu’elle disputera le championnat 2022 : « Nous sommes bien évidemment extrêmement heureux que Cindy développe la 2P0 avec laquelle je devais rouler. Je suis super content parce que je pense que c’est une auto qui va parfaitement lui convenir. » On ne chôme pas du côté de chez Bourgeon Concept puisqu’une nouvelle fois de nombreux TracKing animeront la classe CM sur le Championnat : « Maxime (Dojat) disposera d’un nouveau TracKing et Simon (Taponard) nous accorde sa confiance pour l’intégration sur sa voiture de nouvelles évolutions, je pense qu’Emilien (Thomas) sera de la partie, et Anthony Darand, concessionnaire Peugeot en Belgique, fait son apparition sur le Championnat avec un TracKing reprenant le look d’une 508. Deux Revolt et de nombreux TracKing évolueront en 2022 sur le Championnat de France de la Montagne, de quoi être comblés », conclut Fabien.
Propos recueillis par Bruno Valette ©
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