Ambassadrice de la lutte contre la Fibromyalgie, Aurore Dodille a de par sa pugnacité et son engagement sur le Championnat, donné de l’espoir à tous ceux qui, comme elle, souffrent au quotidien de cette maladie. Mais l’Ambassadrice, qui découvrait cette saison le sport automobile, s’est révélée une compétitrice hors pair qui dans l’adversité n’a jamais rien lâché…
Rien ne prédestinait Aurore Dodille à s’installer un jour derrière le volant d’une voiture de course. Seule la passion que portait son mari Sylvain aux Sports Mécaniques l’incitait à observer d’un regard curieux cet environnement si particulier. Initialement, c’est en spectatrice qu’Aurore suivait Sylvain sur les épreuves, avant que ce dernier ne franchisse le pas en 2016 en prenant part à sa première épreuve : « Cela m’a permis de découvrir l’envers du décor et d’y trouver un réel intérêt », confie Aurore.
Lors d’une séance d’essais que Sylvain Dodille menait sur le circuit de Pouilly en Auxois, lui vint l’idée de proposer le volant de sa voiture à son épouse : « Sylvain m’a lancé le défi de faire quelques tours avec sa Norma, ce que j’ai refusé. Mais devant son insistance je me suis laissé convaincre, et ce fut pour moi une sorte de déclic, car j’ai eu le sentiment que l’expérience pouvais m’apporter de belles sensations. »
« Rouler pour lutter contre la Fibromyalgie »
Mais Aurore était consciente qu’il allait falloir gérer avec la maladie omniprésente, qui au quotidien se traduit par des douleurs incessantes : « La Fibromyalgie n’est pas toujours comprise par le grand public. Les personnes qui en sont atteintes ne présentent aucun symptôme physique et parfois certains émettent des doutes sur leurs souffrances. Dans les tâches du quotidien, on doit gérer le moindre effort, pour se lever le matin, se sécher les cheveux, faire le ménage, ça peut rapidement devenir compliqué. »
Bien évidemment cette complexité de la gestion de la Fibromyalgie doit être prise en compte lors des week-ends de course : « La Course de Côte, par le fait qu’elle ne demande pas un effort prolongée, était pour moi envisageable malgré la Fibromyalgie. Mais il faut garder à l’esprit que sur les terrains fibromyalgiques, l’augmentation du stress accentue la douleur, et bien évidemment, le stress fait partie intégrante de la compétition. Aujourd’hui, en tant que débutante j’ai du mal gérer mon stress, ce qui complique mon approche de la course. »
Perfectionniste dans l’âme, Aurore ne pouvait imaginer aborder la course en dilettante. Pour elle, son implication devait être totale, d’autant qu’elle se savait observée et soutenue par les personnes touchées par la Fibromyalgie, pour qui elle est un exemple et qu’elle ne veut surtout pas décevoir : « Même si je n’avais jamais couru auparavant, j’ai l’esprit de compétition ancré au fond de moi au quotidien. Je suis une battante et je ne pouvais concevoir de ne pas être à fond dans ce projet. » Dans l’esprit d’Aurore Dodille, sa participation au championnat offrait une opportunité de médiatiser la lutte contre la Fibromyalgie, et elle n’allait pas manquer de communiquer auprès de la communauté des fibromyalgiques et du grand public : « Jean-Michel (Bayen), le speaker du Championnat a parfaitement joué le jeu en parlant de la maladie, nous avons également une page Facebook dédiée au soutien contre la maladie, et ma Clio arborait des stickers ’’Rouler pour lutter contre la Fibromyalgie’’. Nous avons essayé de largement communiquer pour mieux faire connaitre la maladie… Cela m’a permis tout au long de la saison de faire des rencontres avec des gens, touchés personnellement ou au sein de leur famille par la Fibromyalgie, et de pouvoir échanger nos expériences, ce qui est toujours très enrichissant. »
En toute logique, Aurore intégrait la structure Max Motorsport créée en 2016 par son mari : « C’était initialement une toute petite association qui permettait à Sylvain de disputer ses premières courses. En 2018, grâce aux soutiens de mécènes, l’association est devenue d’intérêt général ce qui nous a permis d’accueillir de nouveaux adhérents et de pouvoir proposer des prestations à d’autres pilotes. A présent nous disposons d’une structure qui permet de transporter plusieurs voitures de courses, de gérer la logistique, la mécanique et le coaching pour plusieurs pilotes, et de proposer des journées de roulage en circuit. »
Dans le courant de l’année, Aurore Dodille rejoignait également l’Association Des filles et des baquets qui a pour vocation de promouvoir les femmes dans les sports mécaniques : « Nous avons eu la chance d'exposer en cette fin d’année 2019 au salon de l’Auto de Lyon pour cette association représentée par Océane Leroux, et de nombreuses actions devraient être mises en place sur l’année prochaine. »
Débuter avec une Norma 2 litre aurait été pour Aurore déraisonnable, et en début d’année 2019, c’est une Clio Cup qui venait rejoindre la structure de Max Motorsport au sein de laquelle évolue Aurore. C’est au volant de cette voiture qu’Aurore allait s’engager au Championnat : « J’ai pris part aux essais préparatoires de la saison à Creys-Mépieu pour découvrir le maniement de la voiture, et mon objectif initial était de faire parler de ’’Rouler pour lutter contre la Fibromyalgie’’ en prenant part à la Course de Côte d’Abreschviller, et en étant également présente à Limonest sur la dernière épreuve de la saison. Il était en aucun cas question de m’engager sur le Challenge Open. »
Une nouvelle fois c’est Sylvain Dodille qui allait motiver son épouse pour étoffer son programme : « Mon barbu de mari m’a incité à prendre part à la formule Open sur six courses », lâche Aurore dans un éclat de rire. « Je n’avais jamais piloté, et je me suis dit qu’il était fou de me proposer un truc pareil. Mais à la réflexion, comme j’aime bien relever les défis, je me suis laissé tenter et c’était parti ! »
Pour cette première saison, Aurore avait tout à découvrir : Le sport automobile, les épreuves, sa Clio… Dans ces cas-là, rares sont les pilotes qui affichent des objectifs. Mais on l’aura compris, Aurore est une battante qui, lorsqu’elle accepte de relever un défi va au bout des choses, et rapidement elle ne manquait pas de se fixer un objectif : « Au départ, j’étais là uniquement pour faire parler de la Fibromyalgie, mais rapidement, après les premières Coupe des Dames, j’ai visé le titre de Championne de France de la Montagne Production que je voulais offrir à tous les fibromyalgiques qui ont pour moi été un soutien inconditionnel. Je me suis rapidement pris au jeu finalement. »
Six Coupes des Dames sur une première saison
Pour Aurore Dodille le coup d’envoi de la saison sera donné à Abreschviller, une épreuve disputée cette année sous la pluie : « Quand j’ai vu qu’il allait pleuvoir tout au long du week-end, j’ai vécu un grand moment de solitude. J’avais beaucoup d’appréhension mais je me suis concentrée sur les enseignements de mon coach, Kevin (Petit), qui m’a expliqué les points de cordes, les rapports de boîtes, les repères de freinages. Ce fut un gros challenge, et même si le résultat n’était pas au rendez-vous, l’émotion était elle bien présente. »
La Course de Côte de La Pommeraye offrait à Aurore Dodille l’occasion de remporter sa première Coupe de Dames, ce qui restera pour elle un fabuleux souvenir : « Pas que pour moi mais pour toute l’équipe. Ce fut une immense moment d’émotion, sur un tracé que j’ai vraiment apprécié et une course bien organisée. »
La progression d’Aurore se poursuivait à Saint Gouëno, où non seulement elle s’imposait comme première féminine en Production, mais montait également sur le podium de sa classe : « Je reconnais que c’est une épreuve que j’ai trouvée compliquée, sur laquelle j’ai dû pas mal travailler. Pour le reste, c’est une victoire de plus pour l’équipe et pour tous les copains fibromyalgiques qui me suivent sur les réseaux sociaux. »
Avant de se rendre à Marchampt, Aurore Dodille consacrait du temps à préparer ce rendez-vous dans le Beaujolais, et finalement l’épreuve ne fut pas aussi compliquée à aborder que les précédentes : « Ce ne fut pas simple pour autant, mais je me suis sentie rapidement à mon aise », reconnait Aurore qui remporte là une nouvelle Coupe des Dames.
Canicule et fibromyalgie ne font pas bon ménage, et Aurore allait vivre un week-end particulièrement éprouvant à Vuillafans : « Ce fut vraiment intense, d’autant que le tracé est long, rapide, techniques. J’en garde un excellent souvenir mais je ne cache pas que pour moi ce fut difficile. » Sa pugnacité allait être une nouvelle fois récompensée par un succès comme première féminine en Production.
Difficile d’aller chercher une Coupe des Dames à Dunières lorsque l’on est opposée à la multiple Championne de France Martine Hubert, qui pour l’occasion évoluait dans la même classe, au volant elle aussi d’une Clio : « Le week-end avait mal débuté, puisque samedi on a oublié de remettre correctement les attaches capots au moment où je m’élançais sur les essais. Bien évidemment, j’ai pris le capot dans le pare-brise juste avant la ligne d’arrivée. Je n’ai pas pu ensuite prendre part à la seconde montée d’essais et la première montée de course. Mais pour le reste ça s’est plutôt bien passé grâce au team qui a été super réactif et qui a su trouver un pare-brise pour que je puisse me relancer. »
Le Mont-Dore est un rendez-vous important pour le Team Max Motorsport. C’est en effet sur l’épreuve auvergnate que tout a commencé en 2016. Pour les membres de la première heure cette course revêt une importance particulière : « Je me devais de signer une performance au Mont-Dore, je n’avais pas le droit de me louper. Ce fut un peu compliqué pour assimiler le tracé, la météo ne nous a pas aidé, mais le cadre du Massif du Sancy est fabuleux et je garde de cette participation un excellent souvenir », confie Aurore qui repart de Chambon-sur-Lac avec la Coupe des Dames du Production.
A Chamrousse, on s’approchait de la fin de saison et Aurore ne cache pas que le fatigue commençait à se faire ressentir : « Entre le travail, le quotidien et les courses qui s’enchainent je n’ai pas pu réellement préparer ce rendez-vous comme je le souhaitais. J’ai eu du mal à assimiler le tracé, sur la fin du parcours je roulais à vue et j’ai dû improviser à plusieurs reprises, mais je me satisfais de remporter là encore la Coupe des Dames. »
Après avoir réussi la première montée de course sur l’épreuve de Turckheim, Aurore ne cache pas que par la suite elle a fait preuve d’un petit excès d’optimisme, « et dans un gauche j’ai fait une touchette. C’est dommage, car j’étais plutôt très bien. Mais c’est la course et j’ai dû abandonner. »
Aurore concluait sa saison sur le Championnat à Limonest, où elle ne sera malheureusement pas à la fête : « Je me demande si ce n’est pas pour moi la course de trop… J’étais extrêmement fatiguée et je ne suis jamais parvenue à me familiariser avec ce tracé. Je ne suis pas parvenue à me concentrer, je suis passé à côté et j’ai commis de nombreuses erreurs de trajectoires… Mais bon, je découvrais… »
Aurore au bout du défi !
L’exigence qu’Aurore a envers elle-même fait qu’elle considère que le bilan de sa saison aurait pu être mieux encore, mais force est de reconnaitre qu’il est largement positif : « C’est compliqué pour moi de terminer sur un échec comme Limonest. Mais j’avoue avoir vécu une année de folie, en me retrouvant au milieu de pilotes qu’auparavant je regardais passer en bord de piste… C’est pour moi une vraie fierté, pour la cause que je défends, d’être parvenu à relever le défi jusqu’à son terme. C’est incroyable d’avoir pu ramener des trophées, le plus beau étant d’avoir pu porter haut les couleurs de la lutte contre la Fibromyalgie. »
Largement soutenu par la communauté des fibromyalgiques qui n’ont pas manqué de suivre ses prestations tout au long de la saison, Aurore Dodille veut leur adresser ses remerciements : « Mais en premier lieu je veux évidemment remercier Sylvain, mon mari, parce que c’est lui qui m’a lancé le défi de m’engager sur le Championnat et que c’est grâce à lui que j’ai pu aller au bout de cette saison. Un grand merci à ma famille, Damien mon beau-frère, les enfants Lucie, Rose et Max, le Team Max Motorsport avec tous ceux qui se sont investis durant la saison, mon coach Kevin Petit, et également tous nos partenaires. »
L’aventure qu’elle a vécue en 2019 ne peut qu’inciter Aurore à se relancer en 2020 sur une nouvelle campagne de France : « C’est mon vœux le plus cher, mais je ne sais pas encore quel sera mon programme. Tout dépendra du budget, des partenaires qui voudront bien nous suivre. Je vais essayer de refaire un Challenge Open, nous verrons bien. »
Propos recueillis par Bruno Valette ©
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