Pour sa première saison sur le CFM

Pour sa première saison sur le CFM, Jérémy Schilt s’était fixé comme contrat d’être à l’arrivée de toutes les épreuves. Contrat rempli pour l’Alsacien qui au final place sa Formule Renault au cinquième rang du Challenge Open DE/7.

Enfant, Jérémy Schilt résidait au pied d’une pente bien connue des habitués du Championnat de France de la Montagne, celle des 3 Epis. Impossible pour lui de ne pas assister aux prestations des Montagnards qui venaient chaque année affronter le tracé de la Course de Côte de Turckheim – 3 Epis. Rapidement, il se prenait de passion pour ses fascinants bolides et pour les acteurs de la discipline à qui il ne manquait pas de rendre visite dans les paddocks.

Mieux, Jérémy précédait souvent les voitures qui se rendaient en prégrille. Jean-Claude Schilt, son père, convoyait en effet les concurrents au guidon de sa moto, et il n’était pas rare de retrouver Jérémy sur la selle derrière son papa. Très tôt, Jérémy confiait qu’un jour lui aussi serait au départ de la Course de Côte de Turckheim, un rêve d’enfant que son papa estimait irréalisable : « Il me disait toujours, oublie, ça ne se fera jamais parce que la course coûte excessivement cher », se souvient Jérémy.

Si, aux dires de son père, la course automobile était inaccessible, en revanche rien n’interdisait Jérémy de défier le tracé allant de Turckheim aux 3 Epis avec son vélo : « Je me souviens que ce qui me plaisait une fois que j’étais parvenu aux 3 Epis, c’était de prendre la descente à fond. Et un jour j’ai doublé un gars qui évoluait dans un club et qui est venu me voir en me disant que je devrais m’essayer au vélo en compétition. Ça a débuté comme ça. »

Sprinter, Jérémy aura l’occasion de venir chercher des victoires sur routes, mais également sur pistes : « Dans les vélodromes, je m’étais spécialisé sur les épreuves d’endurance, qui dure de 40 à 60 tours, et non sur du sprint pur. » Multiple champion d’Alsace entre ses 14 et ses 19 ans, il terminait une année au pied du podium du Championnat de France. Durant sa carrière Jérémy a eu l’occasion de devancer des cyclistes de la pointure de Nacer Bouhanni, qui a porté le maillot vert de meilleur sprinter à l’occasion du Giro (le tour d’Italie) et qui a remporté plusieurs étapes de la Vuelta (le tour d’Espagne) et d’Arnaud Démare, double Champion de France sur route, vainqueur de deux étapes du Tour de France et de classique telle que le Milan – Sanremo. Le jeune alsacien évoluait donc à très haut niveau.

La course automobile, en hommage à son père
Il y a deux ans disparaissait Jean-Claude Schilt. Jérémy prenait alors conscience que son père qui venait de le quitter avait toujours rêvé de s’essayer derrière le volant d’une voiture de course, mais n’avait jamais concrétisé ce vœux : « J’ai intégré alors qu’il fallait assouvir ses passions, que je ne pouvais pas ne pas réaliser ce rêve qui moi-aussi me tenait à cœur. Clairement, je me suis dit, ''et si c’est moi qui meurs demain, quel rêve n’aurais-je pas réalisé ? ''. La réponse était claire, le sport auto. »

Spécialiste du sprint, Jérémy avait donc des arguments à faire valoir en course de côte, même si les deux univers n’ont que peu de points communs. D’ailleurs, s’il maîtrisait pleinement le monde du vélo, en revanche il avait une totale méconnaissance de celui de la compétition automobile : « Je ne savais même pas comment aborder le challenge que je voulais relever », avoue-t-il. « J’ai commencé à me renseigner, à savoir ce qu’il fallait faire, et ensuite j’ai fait un crédit pour acheter une Tatuus Formule Renault. L’objectif était alors de m’aligner au départ de Turckheim, ce qui était pour moi une façon de rendre hommage à mon père. »

Passionné depuis sa plus tendre enfance, Jérémy suivait les Grand Prix de F1 à la télé, et dans son esprit la course devait se faire en monoplace, d’où le choix de la Tatuus Formule Renault : « J’avais également les souvenirs de la F3000 de Lionel Régal à Turckheim. Je voulais m’installer à mon tour dans une monoplace, même si avec la Formule Renault on est très loin de la F3000. »

Afin de cerner un peu les bases du pilotage, Jérémy Schilt prenait part à quelques slaloms au volant de la Mini avec laquelle il roule au quotidien : « Après j’ai acheté la Formule Renault que j’ai également alignée sur deux ou trois slaloms avant de m’inscrire à La Broque afin de ne pas arriver à Turckheim en étant totalement perdu. » Pour un garçon qui n’avait jamais eu l’occasion de s’installer derrière le volant d’une auto de course ou d’un karting, cette découverte à La Broque se passait plutôt bien : « Le plaisir était au rendez-vous, j’ai beaucoup aimé même si j’ai pris conscience qu’il y avait beaucoup de choses à apprendre. »

Au mois de septembre 2022, Jérémy Schilt réalisait enfin son rêve en se présentant au départ de la Course de Côte de Turckheim : « C’était incroyable… Rien que d’être là c’était émotionnellement très fort parce que je sais que mon père aurait été super heureux de me voir concrétiser ce qui lui semblait inaccessible. Le résultat importait peu, ma plus belle victoire c’était d’être là ! »

Jérémy Schilt, qui a fêté ses 33 ans en ce mois de janvier, sait qu’il ne fera jamais une carrière à haut niveau dans le sport auto. C’est donc avec l’unique objectif de se faire plaisir qu’il aborde la course. Le défi le plus important était donc de s’engager sur le CFM : « Je voulais me prouver qu’en ayant tout à découvrir j’étais capable de participer à un championnat. J’avoue qu’au départ, après avoir acheté la voiture à crédit, je ne savais pas si j’aurais le budget pour faire le championnat. J’ai eu la chance d’être suivi par des partenaires qui savaient que j’allais m’impliquer sur une vraie saison. »

Patron d’un concept store (le Paddock des Loups qui vend des vêtements liés à l’automobile et Sundgovia Automobile) Jérémy dispose d’un garage qui lui permet de pouvoir réviser sa monoplace : « Mon associé a une réelle expertise en mécanique, mais s’il maîtrise tout ce qui est voitures de série, en revanche il ne connait pas vraiment les spécificités d’une voiture de course, et notamment les réglages aérodynamiques, les réglages de châssis. Nous avons donc fait l’essentiel. Quant à moi, pour être honnête, lors de ma première course je ne savais même pas comment il fallait nettoyer les pneus. »

Jérémy mettait donc en place la logistique nécessaire à ses déplacements sur le championnat et s’élançait pour sa première saison avec des réglages standards, qui ne tenaient évidemment pas compte des spécificités de chaque tracé : « Je n’avais pas suffisamment de compétence pour régler la voiture à partir de mon ressenti. J’avais donc confié la préparation au Team Hélium Racing. » Prêt pour affronter cette saison 2023, Jérémy se lançait avec comme préoccupation première de ramener la voiture en entier le dimanche soir et d’essayer de faire progresser ses chronos.

La progression au fil des épreuves
C’est dans la difficulté que débutait la saison de Jérémy Schilt sur la courte Course de Côte d’Abreschviller : « Dès la première montée d’essais les vis de fixation d’un triangle arrière s’arrache de la boîte de vitesses. Avec les trois vis dont je disposais dans ma voiture, il était clair dans mon esprit que je n’étais pas en mesure de réparer et tout s’arrêtait là. Je débutais donc la saison par un abandon. » C’était mal connaitre la solidarité qui règne sur le Championnat de France de la Montagne : « C’est certainement pour moi la plus belle des découvertes, l’entraide entre les pilotes. J’avais la chance d’avoir Fabien Ponchant installé à côté de moi, et avec son entourage ils sont immédiatement venus pour nous aider à réparer. J’ai trouvé ça fabuleux », commente Jérémy qui parvenait au terme de son week-end Lorrain.

En se rendant à Marchampt, Jérémy Schilt s’éloignait pour la première fois de ses bases alsaciennes pour découvrir un tracé qui ne manquait pas de l’impressionnait : « Là je me suis dit qu’il ne fallait pas faire n’importe quoi. J’ai eu un peu d’appréhension mais au final je passe un super week-end. C’est à l’occasion de cette épreuve que j’ai fait la connaissance de Yohan (Bardin) avec qui par la suite nous allons partager nos assistances. C’est également à Marchampt que je prends la décision d’acheter une GoPro pour pouvoir étudier mes courses et les tracés, ce que je n’avais pas jusque-là. »

Si le plaisir était au rendez-vous sur les premiers rendez-vous de sa saison, il sera décuplé à Vuillafans où Jérémy découvrait un tracé qui allait l’enthousiasmer : « J’ai adoré et je me suis surpris parce que j’ai réalisé des chronos que je ne pensais pas être en mesure de faire. J’ai eu la chance de bénéficier des conseils d’Antonin Saintmard qui était pour moi un peu la référence en matière de chrono. Il avait débuté le championnat la saison précédente et j’essayer de me jauger par rapport à ses temps. »

A La Broque, Jérémy Schilt retrouvait le tracé de sa toute première course : « Je suis en progression par rapport à l’année précédente et je suis nettement plus à mon aise. J’en garde un excellent souvenir, d’autant qu’il y a toujours énormément de spectateurs sur cette épreuve et c’est plutôt motivant. » La Broque permettra également à Jérémy de vivre une première expérience sous la pluie : « J’ai fait partie des rares pilotes à avoir pris le départ de la dernière montée qui se déroulait sous la pluie. C’était pour moi une première et c’était à mon sens l’idéal pour découvrir le comportement de la voiture dans ces conditions. »

Il est toujours difficile de trouver le rythme sur le tracé de Dunières. La difficulté est augmentée lorsque l’on découvre l’épreuve auvergnate : « Ce n’est pas la course que j’ai le plus appréciée. J’ai vraiment eu du mal à trouver la cadence. » Mais c’est à Dunières que Jérémy, en terminant troisième des pilotes engagés sur le Challenge Open DE/7, marquait le plus de points.

Pour un pilote débutant, le Mont-Dore est un rendez-vous attendu. Mais sa méconnaissance du Massif du Sancy allait jouer des tours à Jérémy qui se présentait en Auvergne en mode touriste estival : « Et je me suis gelé… Jusqu’au Mont-Dore je dormais sous la tente, et là après la première nuit, j’ai vite quitté la tente pour dormir dans la voiture », se souvient Jérémy. « Mais sinon j’ai adoré la course même si j’ai eu énormément de mal à assimiler le tracé. Après j’avoue avoir été refroidi par les sorties de routes de Christophe Girardot et de Cédric Lansard. »

« Un des plus beaux tracés et un de mes préférés », résume Jérémy Schilt lorsque l’on évoque la Course de Côte de Chamrousse. « C’est rapide, technique, et j’ai beaucoup aimé », analyse l’Alsacien qui, grippé, n’abordait pas cette épreuve dans les meilleures conditions : « Je n’étais pas bien et sur la dernière montée je me suis fait piéger et je suis parti dans une énorme glissade. J’ai pu reprendre la voiture mais j’ai vécu ça comme une alerte qui me disait attention à ne pas trop prendre confiance. Ce rappel à l’ordre m’a été utile. »

A Turckheim, Jérémy abordait le rendez-vous le plus important de sa saison. La course à la maison, chargée en émotions et sur laquelle il pouvait juger de sa progression par rapport à la dernière édition : « Je me présentais dans un esprit conquérant avec la ferme intention d’améliorer nettement mes chronos. Mais ça ne s’est pas passé du tout comme prévu », confie-t-il. « J’avais encore à l’esprit ma figure de Chamrousse et je ne suis jamais vraiment rentré dans la course. Au final, je fais à peine mieux que l’année précédente alors que j’espérais vraiment pulvériser mes chronos. Mais il faut avouer qu’avec la présence de mes partenaires et de nombreux amis, alors que je dois tout gérer seul, j’ai eu du mal à me concentrer sur ma course. Malgré tout je garderai d’excellents souvenirs de l’ambiance qui règne toujours à Turckheim. »

Pour conclure sa première saison sur le Championnat de France de la Montagne, Jérémy Schilt se rendrait à Limonest où il allait passer un fabuleux week-end : « J’ai adoré et je suis content parce que j’ai vraiment bien roulé. Au fil des épreuves j’ai pu assimiler le pilotage d’une Tatuus, notamment au freinage que j’abordais auparavant comme si je disposais d’une voiture de série. Je me suis également rendu compte que j’avais une boîte un peu trop longue et que sur un championnat, si tu veux réaliser des prouesses, il te faut adapter ta voiture à chaque tracé. Mais je suis très content de cette conclusion de ma saison parce que le plaisir était au rendez-vous et que j’ai pu partager ce dernier rendez-vous avec ma femme et mes enfants. »

Contrat rempli pour Jérémy
Au départ de cette saison 2023, Jérémy Schilt avait signé un contrat avec lui-même. Il stipulait qu’il devait être à l’arrivée de chacune des épreuves. Au final, l’Alsacien remplit son contrat, tout en améliorant ses chronos au fil des courses. A l’heure de faire les comptes c’est au cinquième rang du Challenge Open DE/7 qu’on le retrouve : « Ce fut finalement trop court. A Limonest je regrettais que la saison se termine. Mais pour moi le bilan est largement positif parce que je ne savais pas au départ si je disposerais du budget pour honorer mon calendrier, et j’y suis parvenu. La voiture va bien, le plaisir est énorme, j’améliore mes chronos sur toutes les épreuves entre la première montée d’essais et la dernière montée de course, tout est vraiment top », estime Jérémy. « Et puis il y a l’ambiance, les rencontres, l’entraide. Pour moi qui venais seul sur les courses, je ne suis jamais resté seul puisque j’ai eu l’occasion de passer des moments fabuleux avec énormément de pilotes. Et les gars qui évoluent dans la classe DE/7 ne sont jamais avares de conseils et j’ai même bénéficié de l’expertise d’un garçon comme Kevin Petit qui m’a pris avec lui sur des reconnaissance, de partager des repas avec le team d’Olivier Berreur… J’ai pu bénéficier de l’aide de Fabien Ponchant, de la famille Poinsignon, c’est juste génial ! »

Ils furent nombreux durant cette saison 2023 à apporter leur soutien à Jérémy Schilt. Et au terme de sa première campagne sur le Championnat de France de la Montagne, l’Alsacien n’oublie pas de remercier ceux qui l’ont accompagné : « Un grand merci à ma famille, amis, soutiens. Une mention particulière pour ma femme Delphine Schilt, mon associé et ami Tanguy Menet, mon tonton Eric Gsell. Un immense merci à mes partenaires qui rendent cela possible : Fabrice Studer, Contrôle Technique Fessenheim, Muller-Rost Constructions et Charpentes Métalliques, Microbrasserie Guth, Fermital,  Carrosserie Ferlisi et Salvatore Ferlisi, O'Malo France, Hopla Glass, Sundgovia Automobiles, Le Paddock des Loups, O Puissance 4, Voltface Grand Est, Meilleurtaux  Mulhouse, Abeille Assurances Pascal Pairis,  FC Piècesautos, Moto Shop Altkirch, Cosméticar 3 Frontières, Bryan Animation DJ, Delphine Schilt, Rik Gsellou, GT Compétition, Alsace Garage Maintenance, Resetel, Nicolas Millet Photography, l’Asa Alsace, SD toiture Didier Meyer, Daytona 73, Eric Peinture, Resetel, Lowrent Altkirch, et je n’oublie pas les bénévoles, les organisateurs et les commissaires. »

Le plaisir pris par Jérémy Schilt durant la saison 2023 ne peut inciter l’Alsacien qu’à poursuivre dans cette voie : « Je repars avec la Formule Renault avec comme programme l’ensemble des courses, exceptée la campagne de l’Ouest. L’objectif sera de faire évoluer mes chronos et d’aller si possible titiller Antonin (Saintmard), Yohan (Bardin) et si possible de les devancer. » conclut Jérémy.


Propos recueillis par Bruno Valette ©

 

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