Vice-champion de France de la Montagne 2013, Alban Thomas joue depuis de nombreuses années les premiers rôles dans la discipline. Et si pour cette saison 2017 il décidait de délaisser sa F3000 pour rejoindre le peloton des F3, il n’a pas manqué de briller dans la catégorie en montant sur le podium du Challenge Open.
Il n’est jamais évident lorsque l’on se bat pour accéder aux podiums, voire à la victoire scratch, de modifier son approche de la compétition, pour venir animer une catégorie au sein de laquelle il devient impossible de prétendre à la plus haute marche. Mais Alban Thomas, qui durant de nombreuses saisons a compté parmi les rares prétendants à la victoire scratch, a intégré que la lutte pour la gagne pouvait se faire au détriment du plaisir : « J’avais un programme allégé lors de mes dernières saisons en F3000. Et lorsque tu cours moins, les sensations ont tendance à décroître. De ce fait, je ne prenais plus autant de plaisir avec la voiture, je n’arrivais plus autant à me lâcher. J’avais donc envie de retrouver une catégorie dans laquelle je pourrais me sentir plus libéré. »
Alban devait également faire face à un petit manque de motivation, dû au manque de concurrence dans sa classe : « Auparavant, je me battais avec Geoffrey Schatz, à une époque je me retrouvais confronté à des pointures comme Fabien Frantz, et ces derniers temps je me suis retrouvé un peu esseulé. Lorsque l’on est seul dans une classe, ça devient rapidement inintéressant. Il était nécessaire pour moi de revenir dans une catégorie où j’allais retrouver des adversaires », explique Alban. « Et puis avec la F3, je savais où je mettais les pieds, je n’arrivais pas dans une classe qui m’était totalement inconnue puisque ces dernières années j’ai eu l’occasion de rouler en double monte avec Cécile (Cante) sur plusieurs épreuves. »
Retrouvez le plaisir du pilotage
Si Alban connaissait la F3, en revanche il découvrait sa Dallara F303, et savait donc qu’il allait devoir travailler pour la configurer au mieux de ses attentes : « De ce fait je ne m’étais pas fixé d’objectif. La priorité pour moi était de voir, au fil des épreuves, comment se comportait l’auto et de la faire évoluer. Avec une F3 issue du circuit, on savait que l’on allait avoir une somme de travail importante avant qu’elle ne corresponde aux exigences de la côte. » Alban se lançait donc sur le Championnat avec comme principale préoccupation de cerner si le pilotage d’une F3 allait lui convenir tant en termes de comportement que de performances : « Quand tu sors du cockpit d’une F3000, et que tu te retrouves derrière le volant d’une F3, tu peux craindre de ressentir une certaine frustration due au manque de puissance. »
D’ailleurs sur les premières épreuves, Alban Thomas aura quelques difficultés à prendre les départs : « J’avais toujours le sentiment d’avoir 500 chevaux derrière moi, et de ce fait je dosais énormément sur les départs. J’avais 10 ans d’automatisme de la F3000, et il n’est pas évident de s’en débarrasser du jour au lendemain. C’est Marcel (Sapin) qui m’a demandé un jour pourquoi je ’’toussais’’ au départ, et qui m’a fait prendre conscience qu’il fallait que je mette le pied dedans… » Alban découvrait donc un nouvel environnement, un nouveau mode de fonctionnement, avec notamment des passages de vitesses qui nécessitaient une approche bien différente du simple levier dont disposait la F3000.
Début de saison axé sur les réglages
Dans l’esprit, c’est en mode épreuve test qu’Alban abordait la Course de Côte de Bagnols-Sabran, manche d’ouverture de la saison : « J’avais tout à découvrir et j’ai eu le sentiment d’être un peu largué, mais il fallait s’y attendre », estime le Rhodanien qui accroche la troisième place des F3.
L’apprentissage de sa nouvelle monture se poursuivait sur les pentes du Col Saint-Pierre, où Alban terminait à un dixième du podium de sa catégorie : « C’est un peu frustrant en termes de chronos, surtout sur ce genre d’épreuve que j’apprécie particulièrement. J’avais déjà eu l’occasion de disputer le Saint Pierre avec une F3 il y a quelques années, et j’espérais retrouver rapidement mes marques. Je ne peux me satisfaire du résultat, mais l’aspect positif c’est que j’avais le sentiment que nous allions dans la bonne direction. »
En ce début de saison, Alban Thomas devait composer avec une F3 qui ne correspondait pas à ses attentes, et dont le comportement était parfois surprenant. De ce fait il lui sera difficile de se mettre en avant sur la Course de Côte d’Abreschviller, et si à Marchampt en Beaujolais on le retrouvait une nouvelle fois sur le podium de la F3, ses chronos étaient encore loin de le satisfaire.
A Vuillafans, les performances réalisées lors des essais laissaient espérer un bon résultat final : « Là j’étais plutôt pas mal », estime Alban qui signait le quatrième temps juste derrière Billy Ritchen. « Mais dimanche, je m’élançais parmi les derniers, et la pluie nous a empêché de confirmer. C’est pas de chance, mais j’avais toutefois le sentiment que la voiture était en réelle progression. »
Un tête-à-queue sur le Mont-Dore permettra à Alban Thomas de prendre conscience que quelque chose n’allait pas : « Je n’ai pas commis d’erreur qui aurait pu entraîner un tête-à-queue. Le problème venait donc des réglages, et là j’ai compris que dans ce domaine j’avais fait une erreur de mise au point », reconnait Alban : « En début de saison, je m’étais basé sur la voiture de Cécile pour régler ma propre F3, mais j’ai compris alors qu’il y avait quelques petits paramètres différents, qui nécessitaient une autre approche. » Alban parvenait toutefois à rectifier en partie le tir, et terminait deuxième des F3 sur ce Mont-Dore.
Cécile Cante, sa compagne, décidait alors de ne pas poursuivre sa saison, et Alban faisait alors le choix de récupérer sa Dallara F305, afin de faire un comparatif. C’est finalement au volant de cette auto qu’il terminera l’année. Une fin de saison sur laquelle il signait des résultats plus probants, puisqu’à partir du Mont-Dore, il terminera systématiquement deuxième des F3. Ce sera le cas à Chamrousse, puis à Turckheim : « Je garde un très bon souvenir de l’épreuve alsacienne. Je savais que battre Billy (Ritchen) sur ses terres serait très difficile, mais au final je parviens à réduire l’écart qui nous séparait jusqu’alors, ce qui évidemment me réconforte et j’avoue avoir été agréablement surpris. »
A Limonest, Alban terminait à nouveau deuxième, à 227 millièmes de Marcel Sapin : « Il n’était pas loin, mais je n’ai pas de réels regrets parce que tout s’est joué sur la deuxième montée, où la pluie a fait une timide apparition. Je n’ai pas voulu prendre le moindre risque en espérant que la troisième montée serait la bonne. Mais la pluie s’est intensifiée. J’aurais pu jouer la gagne, tenter d’aller chercher le podium scratch, mais je ne suis pas kamikaze, et il aurait été selon moi ridicule de prendre de gros risques sur la dernière confrontation de la saison, où il n’y a plus grand-chose à gagner. »
Pour terminer la saison, Alban Thomas a pris pour habitude de retrouver bon nombre d’animateurs du Championnat sur la Course de Côte du circuit de Bresse. Une épreuve dont il a fait sa chasse gardée. En effet, après s’y être imposé en 2014 et 2015, il rééditait cette année en remportant l’épreuve devant la Norma de Fabien Bourgeon et la Dallara F302 de Didier Brun : « Ça permet de terminer l’année avec les copains et de se faire plaisir sur une épreuve sécurisée où tu peux te lâcher un peu plus. C’est vraiment un bon moment », se contente de dire Alban qui, en toute humilité n’évoque pas cette succession de victoires.
Nouvelle saison en F3 en 2018
Troisième du Challenge Open F3, Alban Thomas se classe neuvième du Championnat de France de la Montagne 2017, et tire finalement un bilan plutôt positif de sa saison : « Je voulais savoir si j’allais me plaire en F3, et de ce point de vue c’est totalement réussi. Pour ce qui est de l’évolution, je faisais depuis plusieurs saisons la mise au point de la voiture de Cécile, et le fait d’évoluer à son volant à partir de Chamrousse m’a fait comprendre les erreurs que j’avais pu commettre en réglant la mienne », analyse Alban qui estime se situer là où il s’attendait de figurer : « Aller chercher Billy me paraissait très compliqué. C’est un super pilote, qui travaille avec acharnement et qui maîtrise bien son sujet. Ma battre avec Marcel qui bénéficie d’une immense expérience et qui reste une référence en F3 m’a conforté dans mes choix. Dans l’ensemble, je suis donc satisfait, d’autant que le plaisir était eu rendez-vous et que j’ai pu totalement me libérer au volant, ce que je ne faisais plus lors de mes dernières saisons en F3000. Le fait de prendre du plaisir et d’avoir le sentiment d’être bien avec la voiture est pour moi synonyme de réussite. »
Une réussite qu’Alban veut partager avec ceux qui se sont impliqués à ses côtés : « Un grand merci à Cécile (Cante) pour son soutien indéfectible, à qui j’associe Jeanne notre fille, à Eric Buffin pour l’assistance, et à mes partenaires, la Menuiserie Gérard Lavigne à Honfleur et les Assurances Aviva à Tassin-la-Demi-Lune, qui me sont toujours fidèles. »
Alban Thomas est en phase de bouclage de budgets pour 2018, et c’est bien évidemment de ses budgets que dépendront son programme : « Je ne cache pas que j’ai l’œil tourné vers la 2ème division, histoire de me donner un nouveau challenge. Dans le même temps, je devrais également être au départ de belles manches du Championnat de France », conclut-il.
Propos recueillis par Bruno Valette
Retrouvez le portrait et le bilan 2016 d’Alban Thomas