Auteur cette année d’une exceptionnelle série de victoires, Yannick Poinsignon semblait filer vers un premier titre de Champion de France de la Montage. Mais une succession de déconvenues en fin de saison le prive d’une couronne qui lui semblait acquise. Loin d’avoir démérité, le Vosgien termine finalement deuxième du Championnat Production à un point de Ronald Garcès. Mais c’est lui qui, grâce au cumul de succès, remporte le Challenge Open GTTS/4.
« Ronald a fait le job, pour moi ça n’a pas voulu sourire », débute Yannick Poinsignon, écartant par le fait qu’il n’est pas dans son intention de remettre en cause le titre obtenu par son rival. Mais après une saison 2021 marquée par une accumulation de déboires, le Team Poinsignon Compétition avait tout mis en œuvre pour que lors de cette campagne de France 2022, la BMW M3 E92 de Yannick soit fiabilisée et que le Vosgien puisse en tirer la quintessence. Ce qu’il fera, les sept victoires signées cette saison le confirment. Mais il était écrit que le sort en avait décidé autrement. En fin de saison, un tête-à-queue qui le prive d’un résultat, un podium loupé d’un millième et une ultime confrontation au dénouement hitchcockien auront raison du pilote de la BMW.
A terme de la saison 2021, c’est à la sixième place du championnat que l’on retrouvait Yannick Poinsignon. Un résultat décevant pour un pilote qui en 2018 et 2019 avait terminé sur le podium : « Après l’énorme travail réalisé pour être réellement performant, il est évident que ce que nous avons vécu est très frustrant », confiait-il alors. « On le sait, c’est le sport mécanique, parfois ça ne veut pas, mais j’avoue que c’est rageant », ajoutait-il.
Durant l’intersaison, Guy Poinsignon, le papa de Yannick, allait une nouvelle fois s’atteler à revoir l’ensemble des éléments de la BMW M3 E92, afin de gommer les imperfections qui avaient engendré quelques désillusions : « Nous avons tout repris de ’’A à Z’’ afin de repartir sur de bonnes bases. C’est ce que nous avions déjà fait la saison passée, mais ça ne s’était pas déroulé comme nous l’espérions. Donc une nouvelle fois mon père a bossé tout l’hiver sur le moteur, le pont, la boîte de vitesses, l’ensemble des éléments » confie Yannick qui pouvait avoir la certitude que rien n’avait été laissé au hasard.
La BMW M3 E92 se devait d’être performante, d’autant que la plateau du GTTS/4 s’était nettement étoffé et que la concurrence s’annonçait rude : « C’est bien évidemment un plus. Plus le nombre de concurrents est important mieux c’est. Cela permet de rivaliser face à des autos compétitives et ça ne donne que plus de valeurs aux résultats. J’ai trouvé intéressant d’avoir un plateau réellement fourni. »
Une adversité que Yannick Poinsignon ne redoute pas, qui ne peut qu’accroitre sa motivation et qui ne changeait en rien ses prétentions : « L’objectif premier était d’améliorer mes chronos des années précédentes et de remporter des épreuves. Ensuite, la cerise sur le gâteau c’est d’accrocher la première place du championnat, c’est après cela que l’on court. »
Avant le coup d’envoi de la saison, Yannick Poinsignon se contentait de quelques tours du circuit de Chambley afin de vérifier que tout était en ordre et que sa BMW se comportait comme il le souhaitait : « Nous n’avons pas rencontré le moindre problème, tout se présentait plutôt bien, de quoi être serein avant de se rendre à Bagnols-Sabran. »
Sept victoires à son palmarès 2022
A l’occasion de ce premier rendez-vous de la saison, la M3 ne sera toutefois pas exempte de problème : « Sur la dernière montée, j’ai le fil de l’excitation de l’alternateur qui était mal fixé sur le châssis et qui est venu toucher le collecteur d’échappement », explique le Vosgien. « Avec la chaleur ça a fait fondre l’isolant du câble, ce qui a engendré un court-circuit électrique. J’ai commencé a voir de la fumée alors que j’étais en prégrille et j’ai immédiatement tout arrêté. Malheureusement, la fusion m’a ouvert le collecteur d’échappement sur cinq centimètres de large et j’ai dû renoncer. » En étant dans l’impossibilité de prendre part à la dernière ascension, Yannick ne pouvait défendre ses chances pour la victoire et terminait deuxième derrière la Lamborghini de Ronald Garcès : « Tout se jouait sur la dernière, elle était hyper importante, et j’avoue que moralement, débuter la saison par une nouvelle galère, ça met un coup. »
Durant toute la semaine qui séparait Bagnols-Sabran du Col Saint-Pierre, Guy Poinsignon n’allait pas chômer : « Il est resté sur place et a dû refaire avec les moyens du bord l’échappement et les collecteurs. Une réparation de fortune qui nous a permis d’être au départ du Saint-Pierre. » Et Yannick ne le savait pas encore, mais la Course de Côte de Saint-Jean-du-Gard – Col Saint-Pierre allait débuter une série de six victoires consécutives : « Je suis bien évidemment satisfait de la victoire sur le Saint-Pierre, mais je garde en tête que les partiels nous démontraient que je perdais du temps sur le bas du parcours. Donc même si j’améliore mes chronos, je sais qu’il manquait un petit quelque chose. A mon sens on aurait pu faire mieux. »
En se rendant à Abreschviller, Yannick Poinsignon n’affichait pas un optimisme débordant. Le tracé lorrain fait la part belle à la puissance, et dans ce domaine la BMW M3 E92 ne peut afficher les mêmes performances que ses rivales : « Tout se joue sur la puissance et j’étais loin de partir favori. Mais finalement ça à bien fonctionné, je m’impose et c’est une victoire qui fait réellement plaisir. »
La victoire, Yannick Poinsignon allait pouvoir la savourer pleinement sur les trois épreuves de l’Ouest où cette année il inscrivait son nom au palmarès : « Ce fut une superbe campagne de l’Ouest, même si ce fut compliqué à Hébécrevon avec de très mauvaises conditions climatiques. On s’impose à la dernière montée mais c’était vraiment chaud », rappelle le Vosgien. « La Pommeraye s’est déroulée sans problème, j’ai signé de bons chronos et c’est une victoire qui là aussi fait plaisir. Pour ce qui est de Saint Gouëno, on rencontre un week-end parfait, sans le moindre souci, avec des chronos qui progressent sur chaque montée. »
Sur sa lancée, Yannick Poinsignon allait poursuivre sa série de succès à Vuillafans, sur un terrain redouté par bon nombre d’animateurs du championnat : « C’est une victoire très importante, tant pour le moral que pour le championnat », confie Yannick qui à ce stade de la saison pouvait légitimement croire en ses chances de remporter le titre : « On voyait que l’on enchaînait les victoires, que l’on prenait un peu d’avance au championnat, il y avait de quoi être optimiste. »
Vainqueur de sa toute première manche du Championnat de France de la Montagne à Dunières à 2021, Ronald Garcès allait récidiver cette année sur l’épreuve auvergnate. Mais Yannick sera là encore un adversaire de taille qui au cumul des deux meilleures montées, place sa BMW à 361 millièmes de la Lamborghini : « Honnêtement, je ne me suis pas rendu à Dunières dans l’optique de gagner. Sur ce terrain je savais qu’il serait très difficile d’aller chercher la première place. Ce n’est pas uniquement pour une question de puissance. Il faut également compter avec d’autres paramètres comme le couple moteur qui te permet de t’extraire plus rapidement des virages, les aides électroniques qui t’offrent la possibilité d’attaquer ta relance plus tôt. Divers éléments qui à mon sens ne me permettaient pas d’envisager de l’emporter sur ce tracé. Donc finalement, la deuxième place me va plutôt bien. »
A Marchampt, Yannick ne manquait pas de reprendre la main en s’imposant cette fois sept dixièmes devant Ronald Garcès : « Là encore, on savait que ça serait difficile. Finalement on s’en sort très bien et la victoire acquise dans le Beaujolais fait particulièrement plaisir », avoue le Vosgien.
Le week-end au Mont-Dore débutait mal pour Yannick Poinsignon qui partait à la faute le samedi lors des essais, à la sortie de la première épingle : « Je n’ai pas trop compris pourquoi. De ce fait cela ne me mettait pas spécialement en confiance à l’heure d’aborder la journée de dimanche. Après, même s’il est clair que l’on préfère toujours terminer premier, je ne suis pas réellement déçu de la deuxième place. Elle me permet de marquer des points importants », confie Yannick qui dans le Massif du Sancy se voit devancé par Ronald Garcès.
Même s’il ne sortait pas vainqueur de la confrontation sur le Mont-Dore, à ce stade de la saison, Yannick Poinsignon disposait d’une avance au championnat qui pouvait lui laisser envisager une fin heureuse. Mais il était écrit que le sort allait s’acharner contre lui. Le Vosgien se voyait en effet privé de résultat à Chamrousse : « Le week-end avait mal démarré suite à la casse de la couronne de démarreur lors de la deuxième montée d’essais chrono », se souvient Yannick. L’équipe était alors contrainte à une longue séance de mécanique. « Nous avons été aidés par deux passionnés de Méca sur Grenoble, qui nous ont permis de pouvoir réparer la cloche de boîte. Mais de ce fait nous avons été obligés de pousser la voiture pour la mettre en route durant tout le reste du week-end », explique Yannick avant de revenir sur l’incident qui l’empêchait de figurer au classement final : « Je suis parti en tête-à-queue sur la deuxième montée, une erreur incompréhensible d’autant que je n’étais pas totalement à l’attaque. Il y avait un truc sur la voiture que nous n’avons pas perçu. Par la suite la troisième montée a été annulée. De ce fait je ne suis pas classé. La frustration est d’autant plus grande qu’un podium m’aurait suffi pour remporter le championnat. Bien évidemment, l’accident de Damien (Chamberod) pouvait justifier l’annulation de la dernière montée. Mais ce que je n’ai pas compris c’est que les Véhicules Historiques de Compétition aient pu eux faire leur troisième montée. On nous a dit que les conditions de sécurité n’étaient pas remplies, en quoi les Vhc disposent de voitures plus sécurisées que les nôtres ? La décision prise m’a paru, pour rester poli, totalement inappropriée. Clairement, soit c’est dangereux pour tout le monde, soit pour personne, mais on ne peut pas faire de distinction entre les différentes catégories », estime Yannick qui ne manque pas de souhaiter un bon rétablissement à Damien Chamberod.
A Turckheim, deux pilotes viendront s’immiscer dans la lutte pour la victoire. Nicolas Werver, qui à domicile impose sa Porsche, et David Meillon qui après avoir déjà accroché un podium sur le Mont-Dore, récidivait à Turckheim. Yannick terminait à la quatrième place, à un millième de la Lamborghini de David Meillon. Un millième dérisoire, mais qui sera par la suite lourd de conséquences : « Chamrousse une montée, Turckheim un millième, quand ça ne veut pas… A Turckheim j’avais pour impératif de terminer deuxième, ce qui m’assurait du titre. Nicolas (Werver) étant transparent pour le championnat, j’ai assuré mes deux premières montées histoire d’être idéalement classé, sans prendre de risque, pour ne pas rééditer le scénario de Chamrousse. A aucun moment je ne vais chercher la victoire, sachant que les points de la deuxième place me suffisent. Finalement je me fais damer le pion pour un millième à l’issue de la dernière ascension, c’est pour le moins frustrant. »
Les cartes étaient alors rabattues, d’autant que Yannick savait que Limonest n’allait pas lui offrir un terrain de jeu idéal pour sa BMW M3. Le combat entre lui et Ronald Garcès, arbitré par David Meillon, sera d’une rare intensité. A l’heure où était donné le départ de l’ultime ascension du championnat, personne n’était en mesure de savoir qui allait remporter le titre. En effet, le jeu des décomptes (onze résultats retenus sur treize) et les bonus attribués aux cinq pilotes réalisant les meilleurs chronos sur les épreuves pouvaient changer la donne. Pilote le plus rapide du week-end sur la dernière montée, Ronald Garcès venait chercher la victoire et le point supplémentaires qui lui permettait de devancer Yannick Poinsignon : « Lorsque tu te bats toute la saison pour un titre et qu’il se joue sur la dernière montée de la dernière épreuve, c’est très frustrant de le perdre. Je le répète, Ronald a fait le job, on ne peut rien lui reprocher. Je pense que je n'ai pas grand-chose à me reprocher non plus, mais ça n’a pas joué en ma faveur. »
Vainqueur du Challenge Open GTTS/4
Vice-champion de France de la Montagne Production, comme il l’a été déjà en 2019, Yannick Poinsignon peut se consoler en ajoutant un titre à son palmarès, celui de vainqueur du Challenge Open GTTS/4. Ce dernier étant jugé sur les huit meilleurs résultats, il échoit de ce fait au pilote Vosgien qui finalement tire un bilan positif de sa saison : « Avec les résultats obtenus cette saison et le nombre d’épreuves remportées, nous n’avons pas à rougir, c’est clair. Sur les trois premiers quarts de la saison on était vraiment bien. Après pour gagner il ne faut pas que du talent et une bonne voiture, la chance fait partie des paramètres, et je n’en ai pas eu. Il était écrit que cette année ça ne serait pas pour moi. A titre personnel, c’est évidemment un peu frustrant, mais c’est surtout pour mon père. Quand je vois le travail qu’il fait, son investissement permanent, je suis hyper déçu de ne pas pouvoir lui offrir un titre qu’il mérite amplement. Perdre pour si peu, c’était vraiment rageant. »
C’est d’ailleurs vers son père, Guy Poinsignon que vont les premiers remerciements de Yannick : « Un immense merci à mon père, ma famille, mes amis et mes partenaires : Epinal Express, Transports FRA, L'Grave, Automobiles Epin, Eurogranulats, Domaine Saint-Wendelin, Bar Au Bon Accueil, Seven Lubricants, Domaine du Pélican, HTR Development, Bar à Vin L'Hermitage, Restaurant l'Abreuvoir, Garage Auto Services, Recrut'Expert Intérim, ASC Racing parts et Michelin. »
Le programme 2023 de Yannick Poinsignon n’est pas encore clairement défini : « J’avoue que je n’ai pas encore pensé à la suite. Depuis Limonest, je ne suis allé qu’une fois dans le garage pour mettre un coup de chiffon à la voiture parce que nous avions un tournage avec Anthony Beltoise pour une émission de télé. Mais sinon je n’ai pas de réelle perspective. Il est évident que tant que mon père sera autant investi on continuera. Donc on va repartir la saison prochaine, mais je suis incapable de dire quel sera mon programme. Pour 2022 ce fut déjà compliqué de trouver le budget, je ne suis pas sûr que ce soit plus facile en 2023. Nous verrons plus clair dans les semaines à venir », conclut le vainqueur du Challenge Open GTTS/4.
Propos recueillis par Bruno Valette ©
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