Après près de 20 ans de compétition automobile, Laurent Leo rêvait de s’inscrire au moins une fois sur le Championnat de France de la Montagne. Un rêve qui est devenu réalité, et qui lui a permis cette année, au volant de sa Seat Ibiza Trophy, d’accrocher une deuxième place au Challenge Open A/4…
Comme beaucoup de passionnés de sport automobile qui ne comptent pas de pratiquant dans leur famille, c’est en spectateur que Laurent Leo a tout d’abord approché la compétition. Tout jeune, avec ses copains, Laurent se rendait sur les nombreuses épreuves organisées sur les routes sinueuses de ses Alpes natales, et notamment sur le Rallye de la Matheysine dont les spéciales se situaient à quelques kilomètres de chez lui : « Dans les années 80, le Rallye de Monte-Carlo passait près de chez nous, et nous étions bien évidemment présents sur le bord des routes », se souvient Laurent.
Footballeur dans divers clubs des villages de sa région, Laurent partageait son temps libres avec ses copains entre matchs, rallyes, mais également courses de côte : « D’abord en spectateur, ensuite j’ai des amis qui ont commencé à courir, ce qui ne pouvait que me donner l’envie de faire de même. »
La détermination comme moteur
Mais à 19 ans, un accident viendra modifier le cours des choses… Tétraplégique suite à cet accident, Laurent Leo ne pouvait imaginer que ce coup du sort puisse entamer sa passion pour le sport automobile : « Ne pouvant pas courir moi-même, j’ai assouvi ma passion en achetant une voiture pour permettre à un pilote de courir », explique Laurent. « Mais je me suis tout de même renseigné sur les possibilités qui m’étaient données de courir avec mon handicap. J’ai donc passé le permis spécifique qui me permettait de rouler en compétition, et je me suis lancé. »
N’essayer pas de faire preuve de compassion envers Laurent Leo, il n’a pas pour vocation d’être le porte étendard d’une cause, mais veut, en toute discrétion, être reconnu comme un pilote parmi tant d’autres.
C’est donc en 2000, qu’au volant d’une 205 Rallye, Laurent Leo prenait part à sa première course de côte : « C’était une groupe A, disposant d’une boîte de vitesses classique, ce qui n’était pas vraiment évident à conduire », se souvient l’Isérois qui roulait alors en régional. Après cinq épreuves disputées avec sa 205, Laurent portait son dévolu sur une 306 : « Toujours avec une boîte normale, ce qui compliquait le pilotage. Finalement, ’’ça ne l’a pas fait du tout’’, puisqu’à deux reprises je suis sorti de la route, dont une fois assez violemment. »
Conscient des difficultés que procuraient les changements de vitesses, Laurent s’attelait à dénicher une voiture à boîte automatique : « Et c’est là que j’ai trouvé une Alfa-Romeo 156, auto homologuée avec la boîte auto, et qui correspondait à ce que je voulais. Là, ça devenait bien évidemment plus facile à gérer. »
En 2004 Laurent Leo débutait donc avec une Alfa-Romeo qu’il conservera jusqu’en 2012 : « A partir de 2008, avec l’Alfa, j’ai disputé mes premières épreuves sur le Championnat. J’ai eu l’occasion de courir à Marchampt, Chamrousse, Limonest, et à partir de là j’ai alterné entre manches du Championnat et épreuves régionales. » En 2013, une panne conséquente sur son Alfa-Romeo incitait Laurent à faire l’acquisition de la Seat Ibiza Trophy, avec laquelle on a pu le voir cette saison sur le Championnat de France de la Montagne : « La Seat, équipée d’une boîte DSG, correspond bien à mes attentes, c’est pour cela que j’ai opté pour ce modèle. »
Sa petite Seat Ibiza évoluant en classe A/4, il était impossible à Laurent Leo de s’opposer aux Supercopa bien plus puissantes. Mais en 2018, avec l’apparition de la classe A/5 qui accueillait les Léon, Laurent se voyait offrir la possibilité de rivaliser avec des voitures similaires à la sienne : « C’est en partie ce qui m’a motivé à m’engager sur le Championnat. Après, je savais qu’avec l’Ibiza et mon handicap, je n’avais pas la prétention d’aller chercher les Clio 4. Ce n’était d’ailleurs pas mon but, l’objectif était de m’engager au moins une fois dans ma vie sur le Championnat, de participer aux côtés des animateurs habituels de la discipline. »
A plusieurs reprises sur le podium de sa classe
C’est à Bagnols-Sabran, sur une épreuve qu’il avait déjà eu l’occasion de disputer en 2013, 2014 et 2015, que Laurent Leo débutait sa campagne de France 2018 : « Ce n’était pas cette année l’édition la plus simple, avec une météo très variable. Mais j’ai réussi à monter au bon moment, et je réalise un bon chrono », confie Laurent qui termine deuxième de la classe A/4 derrière Yann Machka.
La saison de Laurent se poursuivait sur la seconde épreuve gardoise de la saison, manche européenne de notre championnat, le Col Saint-Pierre. Malheureusement il ne connaitra pas à Saint-Jean-du-Gard la même réussite qu’à Sabran : « Je suis sorti de la route lors des essais, en étant un peu trop confiant sur une route humide. J’endommage le pare-chocs, la face avant et le radiateur. N’ayant pas les pièces pour réparer sur place, j’ai dû abandonner... Je suis un peu déçu parce que c’est une super course. »
S’il reconnait que la Course de Côte de Marchampt est une très belle épreuve, Laurent Leo ne cache pas qu’il a dû mal à progresser sur ce parcours tracé dans les vignobles du Beaujolais : « J’ai signé mon meilleur résultat en 2013 avec la Seat, et depuis je ne suis plus parvenu à améliorer. J’ai du mal sur la première partie, et je ne comprends pas vraiment pourquoi je perds du temps. Mais je suis dans les chronos que je réalise habituellement, donc je suis content de mon week-end. »
A Vuillafans, Laurent allait monter une nouvelle fois sur le podium de sa classe en terminant troisième du A/4 : « Je n’étais venu qu’une fois en 2015, et j’avais encore une certaine méconnaissance du parcours. Mais je suis malgré tout très content de mon week-end car je suis parvenu à améliorer. Je sais que je peux aller plus vite, mais pour cela il faudrait que j’enchaîne les éditions de cette épreuve. Après, j’avoue que dans les épingles hyper serrées, c’est assez compliqué pour moi. »
Sur le Mont-Dore, Laurent Leo se retrouvait en confrontation avec une horde de Clio, et savait qu’il lui serait difficile de tirer son épingle du jeu : « L’objectif pour moi était avant tout de me faire plaisir sur une épreuve mythique, et d’essayer d’améliorer mes chronos. Je ne me suis peut-être pas totalement lâché, peut-être un peu reposé sur mes lauriers, notamment sur ma dernière montée. Malgré tout, je fais mieux que lors de mes précédentes participations, et si je suis conscient que j’aurais pu faire mieux encore, je ne peux qu’être satisfait. »
Le large parcours de Chamrousse convient parfaitement à Laurent Leo qui n’allait pas manquer de se mettre en avant : « Il est clair que je joue sur les freins, que je ne rétrograde pas, et donc les parcours très sinueux me pénalisent. A Chamrousse sur un tracé large, je suis à mon affaire, et je suis super content de mon week-end. A l’arrivée, j’étais vraiment heureux car je réalise un chrono que je n’aurais jamais pensé pouvoir faire. Malgré le froid, ce fut vraiment un super week-end », commente Laurent qui place une nouvelle fois son Ibiza sur le podium de sa classe.
Pour conclure sa saison, Laurent Leo se rendait à Turckheim, épreuve qu’il avait déjà eu l’occasion d’aborder par le passé : « Mais cette année le revêtement n’était pas au top, très glissant, et j’ai compris qu’il me serait difficile d’améliorer mes précédents chronos. Et puis Yann (Machka) m’a dit qu’en rentrant dans les points, je terminais deuxième du Challenge Open, j’ai donc roulé plus pour me classer que pour faire une performance. »
Objectifs atteints
Laurent Leo accroche donc cette deuxième place du Challenge Open, à l’issue d’une saison qui lui laissera d’excellents souvenirs : « Je n’ai pas pu être au départ de toutes les épreuves inscrites à mon calendrier initial, mais le bilan est malgré tout très positif. Il est certain que l’on peut faire mieux, mais je considère que j’ai atteint mes objectif. Et puis l’ambiance sur le Championnat est toujours aussi sympathique, c’est génial, et j’adore ça. »
De belles prouesses en course et des moments intenses partagés avec ceux qui ont été à ses côtés, voilà ce que retiendra Laurent Leo de sa saison 2018 : « Je profite de l’occasion pour remercier tous ceux qui m’ont apporté leurs soutiens, en premier lieu Alain, mon beau-père sans qui je n’aurais jamais couru. Un grand merci à Sandra, mon épouse, qui n’a pas eu d’autre choix que de me suivre », confie Laurent dans un éclat de rire. « Merci à tous les pilotes qui m’ont accueilli durant toutes ces années, et qui m’ont considéré comme l’un des leurs en faisant abstraction de mon handicap. Nous avons la même passion, ils m’ont permis de la vivre de la même manière. »
Laurent Leo ne sera pas au départ de la saison 2019. Sa Seat Ibiza Trophy est vendue, et le pilote Isérois mettra la compétition entre parenthèses : « J’ai quelques soucis de santé à régler, ce qui reste bien évidemment une priorité. Je verrai dans le futur si je reviens ou pas sur le championnat », conclut Laurent.
Propos recueillis par Bruno Valette ©
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