La fulgurante ascension de Cindy Gudet

Espoir de l’année Echappement à l’issue d’une saison 2017 qui l’avait vu s’illustrer en slaloms, Cindy Gudet décidait pour 2018 de venir animer le Championnat de France de la Montagne. Une année de découverte des différentes épreuves et de sa Mitjet, qui se solde par un titre de Championne de France Production.

Durant les années 90, Guillaume Berrodier comptait parmi les animateur d’une discipline qui lui était chère, la Course de Côte… Au mois de février 1996, Cécile, la sœur de Guillaume, mettait au monde une petite Cindy, qui n’allait pas tarder à suivre son oncle sur les épreuves. Toute petite, Cindy Gudet évoluait donc dans cet environnement si envoutant qu’est le monde de la compétition automobile. Une passion d’autant plus vive que le père de Cindy, Olivier, évoluait également en Course de Côte au volant d’une Peugeot 306.

« Difficile pour moi de passer à côté », débute Cindy le sourire aux lèvres. Véritable touche à tout, Cindy Gudet s’essayait durant son enfance à différentes disciplines sportives bien éloignées du sport automobile : « J’ai fait du handball, du basket-ball, du foot, un peu de tennis… En fait, j’ai toujours pratiqué un sport avant de pouvoir assouvir ma passion pour la compétition automobile. J’ai toujours eu un attrait pour la compétition, et je me languissais de pouvoir disputer des courses, ne serait-ce qu’au volant d’un karting. »

Karting, slaloms et courses de Côte
C’est en 2009, qu’avec des moyens limités, Cindy Gudet prenait part à ses premières épreuves en karting. L’expérience durera jusqu’en 2013, et lui permettra de s’illustrer sur le Ligue Régionale Rhône-Alpes : « Cela m’a également permis de prendre part chaque année à une Coupe de France Féminine », se souvient Cindy. Les résultats étaient déjà au rendez-vous, puisque la jeune pilote de l’Ain accédait à ses premiers podiums, signait ses premières victoires, et terminait par deux fois quatrième de la Coupe de France Féminine.

Depuis plusieurs années, le karting connait une inflation galopante. Les moyens mis en œuvre par certaines structures semblent presque disproportionnés pour une discipline qui se présente avant tout comme un vivier de jeunes talents. Au milieu de tout ça, Cindy faisait figure de Petit Poucet et avait bien du mal à rivaliser face à des pilotes disposant de moyens nettement plus importants : « Il est arrivé un moment où nous ne pouvions plus suivre, et nous avons donc décidé de mettre un terme à notre engagement en karting. »

Après une période d’interruption, Guillaume, l’oncle de Cindy, lui proposait de faire l’acquisition d’une Dallara propulsée par un moteur de moto de 1300 cm3, pour s’aligner tous les deux en slaloms : « Nous avons alors roulé ensemble, mais rapidement il a préféré me laisser le volant et s’occuper de la voiture, d’assurer l’intendance et la logistique, pour que je puisse courir sans avoir à gérer les à-côtés de la course. »

Après trois slaloms disputés en 2016, Cindy allait étoffer son calendrier pour la saison 2017. Une saison qui allait être celle de la première consécration, puisqu’au final, Cindy Gudet se classait cinquième au scratch sur la Finale des Slaloms en terminant première féminine et meilleure jeune : « Initialement, je m’étais investie dans cette saison en slalom sans objectif particulier, juste pour me faire plaisir. Mais sur les deux premiers slaloms je me classe deuxième, et j’ai alors compris que j’avais peut-être quelque chose à faire. »

Des résultats probants, qui ne passaient pas inaperçus, et grâce auxquels Cindy été élue Espoir de l’année par le magazine Echappement : « C’est à mon souvenir la première fois qu’un pilote de slalom est élu Espoir de l’Année Echappement, et j’avoue que c’était pour moi une énorme surprise. Déjà, c’était inattendu pour moi de faire partie des sélectionnés aux côtés des Jean-Baptiste Francheschi, Lilou Wadoux qui est hyper rapide en circuit, où des garçons comme Pierre Courroye qui gagnait tout en Production et Julien Français qui faisait de même en CN, c’était assez incroyable. »

Mais l’enchantement de cette consécration laissait rapidement la place au doute : « J’ai alors ressenti une certaine pression, parce que je me suis dit que ce titre ne pouvait pas rester sans lendemain, que je me devais de confirmer durant la saison 2018. Mes moyens étaient limités, et je savais qu’il fallait que je trouve des solutions pour proposer un programme digne de cette reconnaissance d’Espoir Echappement. »

La solution allait venir de Nicolas Schatz et de Jean-Michel Lestienne : « J’ai eu fin 2017 un coup de fil de Nico qui me proposait de rouler sous sa structure au volant de la Mitjet de Jean-Michel Lestienne. C’est une opportunité qui ne se refuse pas, même si je rentrais dans un univers totalement inconnu. »

Durant la saison 2017, Cindy Gudet avait eu l’occasion d’aligner sa Dallara sur les Courses de Côte de Bettant, Crest-Divajeu et du Circuit de Bresse. Son expérience dans la discipline se limitait donc à ces trois participations. Quant à la Mitjet, elle savait jusque à quoi ressemblait la voiture : « J’avais tout à découvrir et bien évidemment ce n’était pas sans une certaine appréhension, mais sans pression excessive. Je savais que ça serait difficile au début, j’étais finalement plus pressée d’en découdre qu’anxieuse. »

Victorieuse dès la troisième course
Pour ce qui est des objectifs, Cindy ne cache pas qu’elle espérait pouvoir rivaliser avec les autres ’’Mitjeteurs’’ : « On ne va pas se mentir, au sein de l’équipe on attendait de moi que je remporte un titre de Championne de France qui m’était promis à partir du moment où j’étais à l’arrivée de six manches. A titre personnel, j’avais pour ambition de venir au fil des courses me mesurer aux habitués de la classe GTTS/1. »

Quelques tours du circuit du Bourbonnais sous la pluie, permettaient à Cindy Gudet de se faire une vague idée du comportement de la Mitjet avant de rejoindre Bagnols-Sabran : « Ce que je retiens avant tout de Bagnols-Sabran c’est que j’ai été accueillie par le Team Schatz à bras ouverts, dans une ambiance hyper conviviale de la part de tout le monde », se souvient Cindy. « J’ai beaucoup apprécié le tracé, même si avec une météo peu clémente c’était un peu compliqué pour une découverte. Je suis au final assez éloignée des autres Mitjet, ce qui finalement ne m’a pas réellement surprise, puisque j’abordais ce premier rendez-vous comme une prise en mains de la voiture et non pas avec l’intention de réaliser une performance. »

Loin d’être démoralisée par sa performance en demi-teinte, Cindy analysait sa course avec la ferme intention de progresser par la suite : « Je me remets facilement en question, et donc j’essaie toujours de comprendre d’où peuvent venir les problèmes et comment améliorer la situation. »

Une amélioration qui sera imminente, puisque dès son deuxième rendez-vous de la saison, sur la Course de Côte d’Abreschviller, Cindy se classait deuxième du GTTS/1, derrière son Mécène, Jean-Michel Lestienne : « Sur un tracé qui finalement ne m’a pas déplu, j’ai commencé à prendre la Mitjet en mains, en mettre en pratique les conseils prodigués par l’équipe, et je suis plutôt satisfaite du résultat », analyse Cindy qui, comme à Sabran termine première féminine de la catégorie Production.

C’est sur la Course de Côte de Marchampt que se poursuivait la campagne de Cindy Gudet sur le Championnat. Et pour sa troisième course au volant de la Mitjet, la jeune pilote de l’Ain remportait un premier succès en GTTS/1 : « C’était assez exceptionnel et je ne m’y attendais absolument pas. Durant tout le week-end, le combat était d’une rare intensité et la classe a changé de leader à l’issue de chaque montée. Sur la dernière montée, j’ai vraiment tout donné et je m’impose un dixième devant Jean-Marc (Tissot). C’était ma première victoire sur une manche du Championnat de France, ça restera un souvenir exceptionnel, d’autant que depuis toute petite je venais sur cette épreuve en spectatrice. »

Devancé par Cindy à Marchampt, Jean-Marc Tissot n’allait pas en rester là. Dès Vuillafans, il prenait sa revanche en plaçant sa Mitjet en tête de sa classe, sept dixièmes devant sa jeune rivale : « Comme celui de Marchampt, j’ai beaucoup aimé le tracé de Vuillafans. C’est rapide, avec des épingles qui rendent l’approche compliquée. J’ai fait une petite touchette lors des essais, ce qui ne m’a pas facilité les choses pour la suite. Mais c’est là que tu apprécies d’évoluer dans un team, car tu bénéficies d’un réel soutien et les conseils avisés m’ont permis de progresser rapidement, ce qu’à mon avis je n’aurais pas été en mesure de réaliser toute seule. Pour ce qui est du résultat, Jean-Marc a été plus fort ! »

Une nouvelle fois, Cindy Gudet allait se mesure à Jean-Marc Tissot sur la Course de Côte de Dunières, et ce dernier, faisant fi de toute galanterie, s’imposait avec 68 millièmes d’avance : « C’est une épreuve technique, disputée sur un parcours où l’adhérence est très limitée. Mais je me suis sentie rapidement à mon aise et je me suis bien comportée tout au long du week-end en étant en tête de ma classe. J’avoue que je m’attendais à un retour de Florian (Bartaire) sur la dernière, parce que Jean-Marc était un peu plus éloigné. Finalement, c’est lui qui nous coiffe au poteau, ce qui démontre à quel point on se bat dans la catégorie. »

Décidemment les garçons avaient décidé cette saison d’oublier les convenances. Sur le Mont-Dore, à l’issue d’un combat épique, Florian Bartaire remportait la classe GTTS/1 avec seulement 24 millièmes d’avance sur Cindy : « Pour la deuxième fois consécutive je m’incline pour un écart infime. J’avoue avoir eu beaucoup de mal à apprendre le tracé, et là encore, sans l’appui et les conseils de l’équipe, je ne serais jamais parvenue à signer ces chronos. Le combat était énorme et je suis vraiment satisfaite, car j’étais déjà très contente d’être en tête à l’issue de la première montée, alors que sur ce parcours je pensais vraiment que j’allais être loin. On se bat à coup de dixièmes avec Florian et c’est lui qui l’emporte. Je suis sincèrement très contente pour lui, car c’est une course qui lui tenait à cœur, et je suis ravie de mon résultat pour un premier Mont-Dore. »

Comme sur les épreuves précédentes, Cindy Gudet terminait à Chamrousse première féminines de la catégorie Production. Du côté des Mitjet, elle poursuivait son combat avec Florian Bartaire et prenait sa revanche en devançant de Creusois de six dixièmes : « Avec la Mitjet équipée du moteur 1400 cm3, Jean-Marc Vernex a tôt fait de nous devancer. Ce qui est tout à son honneur, parce que sur le reste de la saison, les Mitjet 1400 cm3 n’étaient pas forcément devant. Nous avons donc entamé notre duel avec Florian, et je le devance à l’issue de la dernière montée. J’avoue que je ne m’y attendais pas, car j’avais fait une grosse deuxième montée, et je ne pensais pas améliorer sur la dernière. Et puis la course, le cadre, tout était réuni pour que nous passions un excellent week-end. »

Qualifiée pour la Finale de la Coupe de France des Slaloms, Cindy Gudet se voyait dans l’obligation de faire l’impasse sur la Course de Côte de Turckheim, organisée le même week-end. C’est donc à Ancenis que l’on retrouvait Cindy début septembre, et là encore, au volant de sa Dallara, elle allait s’illustrer : « Ça s’est bien passé… Je suis partie sur un bon rythme dès les essais, et je pensais faire un bon coup en course. Mais finalement je reste dans les mêmes temps que lors des essais. Alors, évidemment je suis contente du résultat final, mais pas totalement satisfaite de mes chronos », confie Cindy qui termine première féminine, troisième jeune et sixième au scratch.

La saison dans le cadre du Championnat de France de la Montagne s’achevait à Limonest, où une nouvelle fois Cindy Gudet livrait bataille à Florian Bartaire, pour finalement terminer 85 millièmes derrière le Creusois : « Le tracé est technique, difficile, mais j’ai bien aimé. Pour moi, c’est un peu la course à la maison, puisque nous sommes à moins de 30 minutes de chez moi. Amis et partenaires étaient présents, et j’avais à cœur de bien faire. Finalement on se bat comme des dingues avec Florian, ça se joue à rien et ça m’a laissé un excellent souvenir, même s’il y a une petit frustration de terminer aussi près de la victoire », confie Cindy qui remporte sur cette ultime confrontation de la saison une nouvelle Coupe des Dames.

Championne de France, et première féminine sur la Finale de la Coupe
Cindy Gudet a eu l’occasion à plusieurs reprises cette saison de se confronter à des animateurs du Championnat, qu’elle retrouvait sur des épreuves régionales où elle était engagée au volant de sa Dallara : Ce sera le cas à Saint Savin où elle se classait deuxième au scratch derrière Maxime Cotleur. A Bettant, où on la retrouvait sur la troisième marche du podium derrière Maxime Cotleur et Marcel Sapin, et à Crest-Divajeu, où elle accrochait la deuxième place derrière Thomas Clausi. Sixième au scratch à Coligny, Cindy remportait sa classe, comme elle le fera également à Donzy.

Qualifiée pour la Finale de la Coupe de France de la Montagne, Cindy Gudet terminait première féminine et deuxième jeune derrière Pierre Mayeur : « C’était ma première finale en côte et c’est un moment sympa à vivre. Je suis très contente du résultat puisque j’ai pu me battre en féminine, du côté des jeunes, dans la classe. Et je pense que je pouvais difficilement mieux faire. »

Ce n’est finalement pas son titre de Championne de France de la Montagne Production 2018 que Cindy Gudet met en avant lorsque l’on évoque sa saison : « Avant tout je retiendrai que les enseignements dispensés par le Team Schatz Compétition m’ont permis de progresser très rapidement. Seule, j’aurais mis beaucoup plus de temps, et je ne suis pas sûre que je serais arrivée au même résultat. Pour ce qui est des épreuves, je ne peux pas dire qu’il y en ait une que je n’ai pas apprécié, chacune à ses spécificités et son charme », estime la jeune pilote de l’Ain.

Cette première saison sur le Championnat laissera d’excellents souvenirs à Cindy, notamment grâce à l’ambiance qui régnait parmi les pilotes de Mitjet : « On s’est battu à coup de dixièmes tout au long de l’année, dans une super ambiance qui créait une saine émulation. L’entente était parfaite, quel que soit le vainqueur et ça s’est très appréciable », reconnait-elle. « Après, quand je regarde en arrière, je suis consciente que pour une première saison sur le championnat, je ne peux être qu’hyper satisfaite de tout ce que nous sommes parvenus à réaliser. Je suis ravie du résultat, l’équipe également, et je suis bien évidemment très contente de remporter le titre de Championne de France. »

Si elle doit ses succès à son talent, Cindy sait que sa réussite n’aurait pas été possible sans le soutien de ceux qui lui ont fait confiance. En tête de liste de ses remerciements, rien d’étonnant donc de retrouver Jean-Michel Lestienne, qui lui a confié sa Mitjet, et Nicolas Schatz, qui l’a accueilli sous sa structure : « Une énorme merci aux Assurances Lestienne, à Nicolas Schatz Coaching et à mes partenaires, Lifocolor, Métallerie Lampertico, Hifi Filter, Garage Fructus, Jacquet SAS, Concept Adhesif, Vap Expert, Team Mexi Course, ASA Esca, Echappement, le Département de l’Ain, Pixel Chrom’. Je veux aussi remercier mon oncle Guillaume sans qui je ne ferais rien, ma maman qui me soutient dans tous les moments, mon père, Jérôme et Laurence qui nous accompagnent dès qu'ils le peuvent, Nicolas Millet pour ses photos et les communiqués de presse, et toutes les personnes qui me soutiennent via les réseaux sociaux. »

Cindy Gudet ne remettra pas son titre en jeu, non pas qu’elle va délaisser la saison prochaine le Championnat de France de la Montagne, mais elle abandonne la catégorie Production pour venir animer le Championnat Sport : « Tout dépendra bien évidemment du budget, et si nous parvenons à le boucler, je serai logiquement présente au volant d’une monoplace. » Côté objectif, les résultats enregistrés par Cindy cette saison lui permettent d’afficher de légitimes ambitions : « Bien évidemment, je vais essayer de me battre pour le titre de Championne, même si je sais que pour une première année en monoplace, ça ne sera pas facile. »


Propos recueillis par Bruno Valette ©

 

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