L’Alsacien Champion d’Europe de la Montagne

France ou Europe, Nicolas Werver s’illustre sur tous les terrains. Après avoir conquis huit titres de Champion de France de la Montagne Production, l’Alsacien est parti en quête de trophées internationaux. L’occasion pour Nicolas d’enrichir son palmarès de titres de Champion d’Europe.

Nicolas Werver peut se targuer de disposer d’une longue expérience. C’est tout d’abord sur les rallyes de l’Est de la France qu’il fera étalage de son talent derrière le volant. Par la suite l’Alsacien prendra l’habitude de s’aligner sur plusieurs épreuves du Championnat de France des Rallyes, en se testant aux volants de différents modèles. Peu enclin à conserver longtemps la même voiture, Nicolas aura l’occasion de s’illustrer avec différentes BMW en groupe N et A, des Honda Civic, Peugeot 106… Curieux de nature, il n’hésite jamais à se lancer de nouveaux défis. Mais rapidement Porsche deviendra sa marque de prédilection, et l’Alsacien aura l’opportunité d’acquérir ses lettres de noblesse derrière le volant de différents modèles de la marque Stuttgartoise.

Mais c’est avec une BMW M3 qu’en 2005 il s’engageait pour la première fois sur le Championnat de France de la Montagne. L’occasion pour lui de remporter en 2007 un Trophée FFSA du groupe N, avant de délaisser la M3 pour faire l’acquisition d’une première Porsche en 2009 et d’intégrer le groupe GTTS. Les ambitions étaient alors revues à la hausse, et dès la saison suivante il coiffait une première couronne de Champion de France de la Montagne… Rapidement l’Alsacien allait faire preuve d’une nette domination sur le championnat, ce fut le cas notamment en 2015, saison durant laquelle il s’imposait sur les douze manches inscrites au calendrier du championnat. Entre 2010 et 2019, Nicolas Werver remporta huit titres de Champion Production, un record dans la catégorie.

S’il aime changer régulièrement de voitures, Nicolas Werver aime également se lancer de nouveaux défis et partir à la découverte de nouveaux horizons. C’est dans cet optique qu’en 2020 il tournait la page du Championnat de France pour axer son implication en courses de côte sur un programme européen : « Cela faisait plusieurs années qu’entre deux manches du CFM j’allais régulièrement courir à l’étranger », rappelle Nicolas. « Après une quinzaine de saisons à évoluer sur le Championnat de France est apparue une forme de lassitude de participer chaque année aux mêmes épreuves, même si j’apprécie énormément les manches du CFM. Il était alors logique de me diriger vers l’Europe. Cela me permettait d’éviter une sorte de routine et de prendre un immense plaisir à découvrir de nouveaux tracés. »

Un premier titre européen en 2023
Changement d’univers mais fidélité à Porsche puisque c’est au volant d’une 997 GT2 que l’Alsacien allait prendre part à sa première campagne européenne. La fidélité à la marque allemande s’explique non seulement par un réel attrait pour le constructeur germanique, mais également pour les atouts qu’offre les différents modèles : « Porsche propose des véhicules de compétition qui ont à mon sens le meilleur rapport qualité / prix / performance / fiabilité », analyse Nicolas. « On peut trouver des autos plus compétitives, comme les Mitsubishi Lancer ''Bergmonster''. Mais pour un pilote comme moi qui gère mes déplacements en étant souvent seul, la maintenance de ce type de voiture est impossible. Il faut disposer d’une vraie équipe de mécanos pour assurer l’assistance de voitures dont la fiabilité peut être prises en défaut. Je sais pouvoir assurer seul la maintenance des Porsche avec lesquelles j’ai couru, et avec les années d’expérience je maîtrise aujourd’hui leur fonctionnement. Et pour être honnête, si j’ai la passion du pilotage, je l’ai beaucoup moins de la mécanique, il me faut donc une auto fiable. »

C’est en 2020 que Nicolas Werver décidait d’axer son programme sur une campagne européenne, mais la crise sanitaire liée à la Covid aura tôt fait de mettre son programme en suspens. En 2021 et 2022, l’Alsacien se contentera de quelques piges européennes, « qui se sont toujours bien passées avec une accumulation de très bons résultats qui m’ont conforté dans mon choix de faire en 2023 un championnat complet. » Sa première vraie saison européenne se soldera par un titre de Vice-champion d’Europe et un titre de Champion au Performance Factor : « C’est celui qui me tenait le plus à cœur parce que l’attribution des points au Championnat d’Europe est particulière, en ce sens que l’on récompense les succès dans les groupes mais que les victoires au scratch ne sont pas prises en compte. J’estime donc que le classement ''Best Performer'' met réellement en avant les performances et récompense le pilote le plus rapide. Terminer en tête de ce classement me permettait d’atteindre l’objectif que je m’étais fixé. »

Si la saison 2023 sera celle d’une première consécration européenne, elle sera également marquée en fin de saison par un grave accident sur le Rallye National Centre Alsace auquel Nicolas Werver participait en compagnie de Didier Bégout. Et si son copilote était extrait de la voiture avec deux côtes cassées, Nicolas Werver sera plus sérieusement blessé. Hospitalisé, il devait subir plusieurs opérations aux jambes et une intervention sur une clavicule. S’ensuivait une longue rééducation et plusieurs nouvelles interventions chirurgicales : « Cette saison qui se passait à merveille se termine pour moi d’une manière catastrophique… Cette journée d’octobre 2023 fut pour moi dramatique, mais dès que j’ai repris conscience à l’hôpital, la seule chose que j’avais en tête était de m’installer à nouveau derrière le volant. Pour cela il fallait que je retrouve la meilleure forme possible pour reprendre la course dès le printemps. »

Un long combat fait de courage et de volonté
Pour le corps médical, l’échéance que se donnait Nicolas en voulant être au départ du Col Saint-Pierre au mois d’avril était totalement déraisonnable, voire absurde : « J’étais vraiment le seul à y croire. L’ensemble des médecins, ma famille, mon entourage, tout le monde estimait que c’était impossible, mais ce challenge décuplait ma motivation. » Compétiteur derrière le volant, Nicolas Werver l’est également dans la vie, et pour parvenir à relever le défi d’aligner sa Porsche sur le Col Saint-Pierre, il fera preuve d’une détermination sans faille et d’une volonté farouche : « C’était très dur, je devais me battre au quotidien, mener une rééducation sur un train d’enfer entre chaque interventions chirurgicales subies durant l’hiver. Je suis repassé sur le billard tout juste un mois avant le Col Saint-Pierre. C’était donc très tendu parce que je suis sorti du centre de rééducation une semaine avant de me rendre à Saint-Jean-du-Gard. »

L’objectif premier de Nicolas à l’heure d’aborder l’édition 2024 du Col Saint-Pierre était de voir s’il était en mesure de piloter correctement et d’assurer par la suite son programme européen : « J’avoue que lorsque je me suis retrouvé au départ de la première montée d’essais, même si dans ma tête j’estimais que je pouvais être compétitif, je savais que seul le chrono allait confirmer ou infirmer mon ressenti. » Le verdict tombait alors, Nicolas Werver signait le meilleur chrono de la première montée d’essais, près de sept secondes devant son premier poursuivant : « Pour moi, à ce moment-là c’était juste incroyable », avoue-t-il. Tout aussi incroyable sera la suite de son week-end puisque pour son retour l’Alsacien imposait sa Porsche 997 GT3 R après avoir signé les meilleurs chronos sur les trois montées de course. « Emotionnellement c’était hyper fort. Je n’avais plus roulé depuis mon accident et parvenir à ce résultat alors que personne ne me pensait capable d’être au départ de cette course c’est réellement intense. »

Le résultat obtenu sur le Col Saint-Pierre était de bon augure pour s’attaquer au Championnat d’Europe que Nicolas abordait l’esprit serein, avec comme objectif de conserver son titre : « Vu le déroulement du Saint-Pierre, je n’avais pas de raison de ne pas afficher clairement mes ambitions, même si physiquement je n’étais pas à 100 %. J’avais conscience que face à une concurrence des plus relevées sur le Championnat d’Europe ça allait être compliqué, notamment sur les premiers rendez-vous. L’idée était d’assurer des points sur les premières manches et à partir de la mi-saison d’aller chercher des victoires quand je serai plus en forme. »

Au volant de sa Porsche 997 GT3 R, Nicolas Werver allait donc animer le Groupe 2 de la Catégorie 1 du Championnat d’Europe de la Montagne dont le coup d’envoi était donné à Rechberg en Autriche. Une première confrontation qui le voyait terminer au quatrième rang de la Catégorie 1, mais deuxième du Groupe 2 : « C’est à la fois bien, mais pas excellent quand on tient compte du mode d’attribution des points. Clairement en ne marquant pas le maximum de points, tu peux te retrouver avec un pilote qui remporte toutes les épreuves dans son groupe et qui gagne le championnat alors que finalement il est moins performant que toi. Quand tu n’engranges pas le maximum de points sur le premier rendez-vous, tu te retrouves confronté à ce cas de figure que tu ne peux absolument pas maîtriser. »

Nicolas Werver savait toutefois que l’épreuve autrichienne s’annonçait comme l’un des rendez-vous les plus difficiles de la saison : « Je me retrouvais confronté à Jörg Weidinger qui est l’un des pilotes allemands les plus rapides et qui malheureusement évolue dans la même catégorie que moi. Je savais que ça serait donc compliqué. La quatrième place de la catégorie n’a pas vraiment d’importance, l’essentiel était cette deuxième place dans le groupe 2… On peut considérer que je n’ai pas gagné, mais je suis plus vite' que l’année précédente alors que je suis physiquement affaibli. Je termine à seulement cinq dixièmes de Weidinger, ce qui reste une super perf. »

La situation sera nettement plus claire en Espagne où Nicolas signait un succès sur la Subida al Fito : « Je m’étais imposé lors de la précédente édition en signant le record de la piste. Je me suis donc rendu sur cette épreuve avec la nette prétention de l’emporter, ce que j’ai réussi à faire », explique Nicolas qui estimait alors disposer d’une auto parfaitement adaptée à ses attentes. Un constat important pour l’Alsacien qui se rendait seul sur les deux épreuves ibériques, Subida al Fito en Espagne et la Rampa da Falperra au Portugal : « Compte tenu de ma forme physique ce n’était déjà pas évident de faire seul ce long trajet. Le résultat me fait donc d’autant plus plaisir », avoue-t-il. « J’aborde la course en flux tendu », plaisante Nicolas pour dépeindre son ressenti d’être esseulé sur les épreuves. Mais l’Alsacien connaitra à nouveau la réussite au Portugal, car si la Mercedes SLK 340 de l’intouchable Suisse Reto Meisel le devançait, Nico imposait sa Porsche en tête de son groupe : « Un succès de haute lutte face à un pilote portugais très rapide avec une Porsche 992 Cup de dernière génération. »

C’est à nouveau en leader du groupe 2 qu’il concluait le week-end tchèque sur la Course de Côte d’Ecce Homo – Sternberk. Mais là encore pour aller chercher la victoire Nicolas Werver devra déployer d’importants efforts : « J’ai un caillou qui est venu sectionner la courroie d’accessoires qui entraine la pompe à eau, la direction assistée, l’alternateur, autant dire quelque chose de vital. Cela s’est produit sur une manche de course, ce qui m’a ralenti dans la montée, d’autant que j’avais de l’eau qui coulait sur les roues, ce qui perturbe considérablement l’adhérence. » Nicolas avait donc comme priorité d’éviter l’accident, tout en validant un chrono pour s’assurer un classement final. « Il a fallu travailler pour réparer et le week-end fut compliqué. »

L’Alsacien se rendait par la suite en Allemagne pour affronter le tracé de la Glasbachrennen qui le verra signer un nouveau succès : « Je trainerai les soucis rencontrés à Sternberk sur les deux prochaines courses. Ce sera donc le cas en Allemagne où à cause de la pompe à eau je subissais des fuites d’eau intermittentes qui coulaient sur mes roues. Ç’était très perturbant parce qu’on intervenait sur la voiture en pensant réparer, et finalement ce n’était solutionné qu’en partie. Je me suis fait quelques frayeurs à cause de ça. » Le problème persistera lors du week-end italien pendant lequel se déroulait la Course de Côte de Vallecamonica sur laquelle Nicolas Werver imposait malgré tout sa Porsche : « Le week-end fut intense mais productif. »

A l’heure de se rendre à Limanowa, en Pologne, Nicolas Werver savait qu’il ne serait pas à son avantage : « L’adhérence donne l’impression que l’on court une épreuve sur terre, et face à des pilotes Polonais qui roulent tous avec des quatre roues motrices ultrapuissantes, on sait qu’on va ''ramasser''. Mais ça fait partie du jeu et j’ai tout fait juste pour assurer des points en terminant troisième de mon groupe à quatre millièmes du deuxième. Le résultat me satisfait pleinement. »

Les qualités dont disposent la Porsche 997 GT3 R peuvent être pleinement exploitées sur un tracé comme celui de Saint Ursanne – Les Rangiers. Nicolas Werver abordait donc l’épreuve Suisse en confiance : « Je savais qu’en ne commettant pas d’erreur je devais m’imposer », estime Nicolas qui remportait une nouvelle fois le groupe 2. La donne ne sera pas du tout la même en Slovénie où le tracé de la Course de Côte d’Ilirska Bistrica ne convient pas vraiment à la belle allemande : « On trouve sur ce parcours trois chicanes et de nombreux virages très lents avec des relances. Ce n’est pas le profil idéal pour la Porsche et je me suis vraiment surpris en accrochant la victoire sur cette épreuve. C’est un résultat aussi bon qu’inespéré. » La saison européenne se concluait en Croatie où Nicolas Werver viendra chercher une ultime victoire de groupe sur la Course de Côte de Buzetski Dani : « Parfait ! » lâche Nicolas lorsque l’on évoque son week-end croate. « D’excellents chronos, tout s’est parfaitement déroulé. »

Second titre de Champion d’Europe
A l’heure de faire les comptes, Nicolas Werver remporte un nouveau titre de Champion d’Europe en terminant en tête du Groupe 2 de la Catégorie 1 et en étant le ''Best Performer'' de la saison : « C’est largement positif et enthousiasmant parce que la saison n’a pas été facile. Je n’ai toujours pas retrouvé l’intégralité de mes capacités physiques, et nous avons dû composer également tout au long de la saison avec des conditions météorologiques changeantes qui ne facilitaient pas les choix de pneumatiques. Ce fut une dure saison avec une gestion difficile des choix de pneus et de set-up », analyse Nicolas.

« Ce fut quasi-parfait », estime l’Alsacien lorsqu’on lui demande quel bilan il tire de cette campagne européenne : « Si je devais refaire la saison, je pense que je ne changerais rien. Tout se conformait à ce que je voulais et j’estime avoir réussi à tout optimiser. Je pense que même si j’avais été dans les mêmes conditions physiques que lors des saisons précédentes, je n’aurais pas fait mieux. »

En ce mois d’octobre 2024, cela fait maintenant un an tout juste que Nicolas doit gérer les séquelles d’un grave accident : « Je ne me plains pas parce que pour piloter je n’éprouve pas de gêne. En revanche, dans la vie de tous les jours c’est nettement plus compliqué. Clairement j’ai encore besoin de beaucoup de temps et de rééducation et je bosse énormément là-dessus, tant chez le kiné qu’à la maison. C’est encore très douloureux, il y a encore pas mal de choses que je ne peux pas faire, mais je ne lâche rien », confie le multiple champion dont on connait la détermination. Nicolas espérait d’ailleurs mettre à profit la pause hivernale pour se faire retirer les nombreux éléments implantés dans ses jambes : « Mais le chirurgien estime qu’il est encore trop tôt. Les opérations seront donc programmées durant l’hiver 2025/2026. »

Nicolas Werver tourne la page d’une saison 2024 difficile mais particulièrement prolifique, à l’issue de laquelle il tient à remercier tous ses soutiens : « Un immense merci à tous les copains qui m’ont aidé dans cette épreuve difficile cet hiver, j'ai pu constater que j'avais de vrais amis. Evidement merci à tout le personnel soignant, chirurgien, médecins, infirmières, aides-soignantes, toute l'équipe de kiné, coach sportif, etc… Merci à Vanessa qui me supporte au quotidien, elle a été la première impactée par les conséquences de cet accident et a su gérer au mieux la situation pendant ce long hiver !  Un grand merci également à mon fils Baptiste, Paul et Quentin qui m'ont épaulé sur quelques courses quand c’était possible. Merci Micka, Gillou et Jeff pour votre aide à l'atelier, toujours présents a l'appel quand ils sont sollicités ! Merci à tous pour votre soutien et surtout à mes partenaires fidèles : André Chipeaux Motor concept, Société Schilling (bâtiment), Scierie Girard, Michelin Motorsport, Motul, SOS impact, l’Asa Alsace… Pour la saison à venir, si vous souhaitez être associés à notre belle aventure Européenne comme partenaire, n'hésitez pas à nous rejoindre. »

L’esprit tourné vers 2025, Nicolas Werver observe les nouveautés que pourrait comporter la règlementation à venir : « Il est probable que je reparte pour une saison en Championnat d’Europe. Mais avant de finaliser mon projet je veux savoir quelles seront les règles en vigueur », confie l’Alsacien qui espère également faire quelques apparitions sur les épreuves françaises : « Pour l’heure, le projet est axé sur l’Europe, mais ce n’est pas du 100% et il n’est pas totalement impossible que je m’oriente sur la France, ça se décidera en début d’année. » Pour ce qui est de la voiture, Nicolas qui aime changer régulièrement de monture estime probable de repartir avec la Porsche 997 GT3 R. « Un nouveau projet est en cours, mais il est encore trop tôt pour en parler. Aujourd’hui en n’ayant pas retrouvé l’intégralité de mes moyens physiques, je n’avance plus aussi vite. Je ne veux donc pas mettre d’échéance à mes objectifs à venir », conclut le Champion d’Europe


©Bruno Valette
www.ffsamontagne.org / www.cfm-challenge.com

 


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