A l’heure de s’engager sur le Championnat de France de la Montagne, Jean-Sébastien Fel n’avait d’autre prétention que de tester la Peugeot 308 Cup qu’il allait en fin de saison transmettre à son fils Matteo. Un passage de relais particulièrement réussi, puisque le jeune auvergnat réalisera des prouesses sur ce qui allait être ses toutes premières courses.
C’est au volant d’une Simca Rallye II que Jean-Claude Fel, le père de Jean-Sébastien, débutait la compétition automobile en 1978. Des débuts en course de côte, une discipline dans laquelle il allait parfaitement assouvir sa passion du sport auto, en évoluant sur les épreuves régionales du Cantal et des départements limitrophes. 1978, c’est également l’année de naissance de Jean-Sébastien, qui très tôt ne manquait pas de suivre son père sur les épreuves, et donc d’apprécier dès sa plus tendre enfance l’univers si accueillant de la course de côte.
Cadet d’une fratrie de trois garçons, Jean-Sébastien voyait ses frères ainés, Laurent et Philippe s’immiscer dans les pas de leur père, en prenant part à leur premières courses, alors que lui, bien plus jeune, était encore pré-adolescent. Le virus étant familial, il y avait peu de chance que Jean-Sébastien soit épargné, d’autant que les discussions tournaient autour de la mécanique puisque l’entreprise familiale avait comme statut social la réparation de poids lourds.
Premiers pas en régional avec une Rallye II
Si durant sa jeunesse, ses mercredis et samedi étaient occupés par la pratique du rugby, Jean-Sébastien ne manquait pas de s’adonner également au karting pour acquérir ses premières notions de pilotage. Et tout naturellement, dès l’âge de 18 ans, il participait à sa toute première compétition, cette fois au volant d’une voiture : « J’ai fait mes débuts sur la Course de Côte de Pleaux au volant de la Rallye III prêtée par mon père », se souvient Jean-Sébastien. « Par la suite, j’ai pris part à plusieurs épreuves, mais de manière intermittente sans avoir réellement de programme de saison complète. »
En 2009, Jean-Sébastien obtiendra toutefois son ticket pour la Finale de la Coupe de France des Slaloms qui se déroulait cette année-là en Bretagne. Une participation qui se soldait par une deuxième du Groupe FC : « Ce fut réellement le seul moment où j’ai pu participer à un championnat, car je n’ai jamais eu énormément de temps à consacrer à la course, mes obligations professionnelles ne me laissant que peu de temps libres », explique Jean-Sébastien. « Je parvenais à m’engageait sur une dizaine d’épreuves dans la saison, mais principalement des régionales, sans m’investir sur un championnat. »
Jean-Sébastien ne se contentait toutefois pas du rôle de pilote. C’est lui qui sera à l’origine de l’importation des Proto Speed-Car en France : « C’est de là que mon ami Yves Tholy est devenu l’ambassadeur de la marque dans l’hexagone », explique Jean-Sébastien qui avant de confier le volant de ce Proto à son pote, aura l’occasion de rouler à son volant.
Après avoir couru avec la Simca Rallye de son père, Jean-Sébastien décidait de disposer de sa propre voiture et portait son choix sur une Peugeot 205 Groupe F : « Que je ne garderai pas très longtemps puisque je suis sorti assez violemment sur le Rallye du Cantal alors que je voulais m’essayer sur cette discipline. » Blessé dans cet accident et avec une auto détruite, Jean-Sébastien Fel se voyait contraint de mettre le sport automobile en stand-by.
En 2014, Matteo Fel-Astorg, le fils de Jean-Sébastien, faisait ses débuts en karting, « et j’ai décidé de me concentrer sur sa carrière sportive, et donc de ne plus courir moi-même », explique le Cantalien. « Nous avions mis en place des programmes conséquents qui nécessitaient que j’investisse le peu de temps que je pouvais consacrer à la compétition. »
Une 308 Cup pour les débuts de son fils
Au mois de septembre 2021, Matteo devait fêter ses 18 ans, et comme son père l’avait fait précédemment, il souhaitait ardemment s’installer derrière le volant d’une auto de course : « Nous en avons parlé afin de faire un choix de voiture qui nous paraissait le plus judicieux. Pour un jeune qui vient de la piste, il me semblait plus sécurisant de nous tourner vers la catégorie Production, et nous avons donc opté pour une Peugeot 308 Cup. »
Avant de laisser le volant de la 308 à son fils, Jean-Sébastien décidait de tester la voiture afin d’en optimiser les réglages. Et pour cela, il s’engageait sur le Championnat de France de la Montagne : « Sans autre ambition que de bien cerner le comportement de ma voiture, et de retrouver mon ami d’enfance Yves Tholy, qui fut un de mes complices quand je faisais du karting, et avec qui je partageais les week-ends quand nos pères roulaient en course de côte. »
Jean-Sébastien Fel n’a jamais eu la prétention de venir défier les hommes forts du groupe A : « J’espérais signer quelques bons chronos pour me faire plaisir, mais avant tout conserver la voiture dans un parfait état pour que Matteo puisse la retrouver dans des conditions optimales. »
Sur le tracé de la Course de Côte de La Pommeraye, Jean-Sébastien Fel découvrait une nouvelle épreuve et le maniement de sa Peugeot : « Ca m’a laissé un super souvenir, c’est juste dommage que la météo ne fût pas au beau fixe pour pleinement savourer le week-end. Il est clair que j’aurais préféré faire mes premiers tours de roues sur le sec, mais je suis malgré tout très content parce que je ne suis finalement pas largué par la concurrence », explique Jean-Sébastien qui termine au troisième rang de sa classe derrière Stéphane Garcia et Jean-Pierre Pope. Plus qu’enthousiasmant pour un pilote qui avant de se rendre en Anjou n’avait pas fait le moindre essais avec sa 308.
C’est ensuite à Dunières, au volant d’une 308 reprenant strictement la même configuration que celle dont il disposait à La Pommeraye, que l’on retrouvait Jean-Sébastien. L’Auvergnat n’avait jamais eu l’occasion d’affronter le tracé de cette épreuve et en conservera un très bon souvenir : « Même si tout au long du week-end j’ai eu des soucis avec les départs, la procédure ne fonctionnant pas comme elle devrait. C’était un peu frustrant, et apparemment ça ne venait pas de moi puisque je l’ai fait essayer à Jean-Pierre Pope, nettement plus expérimenté que moi avec la 308, et il m’a confirmé que ça ne fonctionnait pas. »
S’il a fait l’essentiel de sa carrière sportive en régional, Jean-Sébastien Fel a déjà eu l’occasion de s’engager sur le Mont-Dore. C’est donc un tracé qui lui était connu qu’il retrouvait pour son troisième rendez-vous de la saison : « J’avais déjà eu l’occasion de rouler en Proto CM, mais l’approche est très différente et le comportement des pneus également. Et dimanche matin, sur la première montée je me suis fait piéger et je suis parti en tête-à-queue. J’avoue que ça a bien calmé mes ardeurs pour la suite et que je n'ai plus pris le moindre risque », commente Jean-Sébastien qui termine, comme à Dunières, cinquième de sa classe.
Tout au long de la saison, Jean-Sébastien Fel a roulé avec une auto dans l’exacte configuration dont elle disposait au moment de son acquisition : « Je ne voulais pas toucher les réglages, moteur, amortisseurs, châssis, avant d’avoir la certitude de comprendre son maniement. Mais pour la fin de saison, nous avons acheté un nouveau moteur et c’est Matteo qui avait en charge de l’étrenner. »
Passage de relais !
En l’espace de sept années de compétition en karting, Matteo qui a eu l’opportunité de participer à des épreuves internationales, a acquis une énorme expérience. Toutefois, il n’avait jamais eu l’occasion de prendre part à une course de côte. Le lundi 6 septembre, Matteo Fel-Astorg fêtait ses 18 ans, le vendredi suivant il était à Limonest, prêt à en découdre. Et pour un coup d’essais, il réalisait un coup de maître en accrochant la dixième place scratch, la cinquième du groupe A et la troisième de la classe A/4. Le tout assorti d’une Coupe du Meilleur Jeune en Production.
Comme tout les observateurs de la discipline, Jean-Sébastien ne pouvait être que surpris par la performance de son fils : « Honnêtement je pensais qu’il serait ’’vite’’, mais je n’imaginais pas qu’il se positionne aussi rapidement à ce niveau-là. Avant Limonest, il a eu l’occasion d’essayer la voiture sur le circuit de Lédenon, fin août, et j’avais pu voir qu’il était particulièrement à son aise. »
Bien évidemment Jean-Sébastien ne peut être que fier de la prestation réalisée par sa progéniture : « Non seulement parce qu’il signe un bon résultat mais également parce que je suis assez admiratif de l’intelligence dont il fait preuve dans son approche de la course. Il sait apprendre sans griller les étapes, en essayant de bien cerner tous les éléments. Cette première participation fut très positive. »
Matteo n’allait pas s’arrêter en si bon chemin. Pour terminer la saison il se rendait à Lodève, épreuve inscrite au calendrier du Championnat de France de la Montagne 2ème Division. Et dans l’Hérault, le jeune auvergnat allait mettre à mal tous les pronostics. Sixième au scratch, Sport et Production confondu, il terminait en tête du classement Production devant la Seat Léon Supercopa de Nicolas Granier et la Peugeot 308 de Stéphane Garcia : « Nous avions décidé de faire deux épreuves radicalement différentes : Limonest qui propose un tracé technique et Lodève nettement plus rapide. C’était idéal pour bien apprendre et je pense que Matteo a bien appris ! » Le jeune Fel-Astorg faisait là ses premières armes sous la pluie et sur un tracé bien plus long que celui de Limonest, signait une performance de tout premier ordre.
Pour Jean Sébastien Fel, le bilan de cette saison 2021 est largement positif : « D’une part parce que j’ai pris énormément de plaisir, que j’ai pu conjointement mener mes occupations professionnelles et la compétition, et que je ne peux être que ravi des résultats de Matteo. »
Sa première saison sur le Championnat de France de la Montagne laissera à Jean-Sébastien Fel d’excellents souvenirs. Nombre d’entre eux sont partagés avec ses proches qu’il tient à remercier : « Un immense merci à tous les amis qui nous aident et à la famille qui accepte que nous passions tout ce temps sur les courses. Merci à Chrystelle mon épouse, à ma fille Alexia qui est passionnée et suit de près les courses, le Garage Fel, Seb qui tout au long de la saison a transporté la 308 sur les épreuves, merci également à David qui me donne un coups de main et à Anthony. Je n’oublie pas tous les pilotes pour l’accueil et grâce à qui la convivialité règne sur les épreuves. »
2022 sera donc la saison du passage de relais entre le père et le fils, car si Jean-Sébastien a décidé de ne pas repartir, c’est Matteo que l’on retrouvera derrière le volant de la 308 Cup : « Il était logique qu’il prenne la succession, il sera à n’en pas douter plus rapide que moi. Bien évidemment, il se doit de privilégier ses études, et ne sera donc pas au départ de l’intégralité des manches du championnat, mais on devrait le retrouver sur les deux premières manches de la saison, Bagnols-Sabran et le Col Saint-Pierre, faire l’impasse sur les épreuves de l’Ouest et de l’Est, et se concentrer sur les épreuves du centre de la France », explique Jean-Sébastien. Nul doute que Matteo sera un très sérieux prétendant au titre de Meilleur Jeune en Production en 2022.
Propos recueillis par Bruno Valette ©
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