Pour son retour sur le Championnat de France de la Montagne cette saison, Jérôme Janny n’avait d’autres prétentions que de se familiariser avec sa nouvelle Seat Léon Supercopa. Le Lorrain a rapidement pris ses marques, et aurait pu d’entrée de jeu remporter le Challenge Open A/4. Il s’en est fallu de peu, puisqu’il termine à égalité de points avec Francis Dosières et que c’est aux nombres de succès obtenus sur les épreuves inscrites à leur calendrier sportif, que l’expérimenté pilote de l’Aube devance son jeune rival.
L’an dernier encore, c’est au volant d’une Peugeot 106 groupe N que Guy Janny était au départ du Mont-Dore. Une énième participation pour celui qui, depuis des décennies se partage entre Courses de Côte et Rallyes, et qui a transmis à Jérôme, son fils, cette passion addictive qu’est la compétition automobile.
Dès qu’il fut en âge de marcher, Jérôme Janny accompagnait son père sur les manches du Championnat de France de la Montagne. Très tôt, le jeune lorrain prenait conscience que lui aussi, à son tour, s’installerait un jour derrière le volant d’une voiture de course. Totalement intégré au sein de la grande famille des Montagnards, il était pour lui logique de se diriger vers cette discipline.
Et ce n’est qu’un mois après avoir obtenu son permis de conduire, qu’il alignait la Golf de son père au départ de la Course de Côte de Schirmeck. En cette année 2003, Jérôme sera également au départ du Mont-Dore et de Limonest. Il envisageait même de prendre part à la mythique épreuve du Ventoux, mais convoqué le lundi matin pour passer un examen, il devait renoncer. Ce forfait restera pour lui un vrai regret, l’épreuve ayant été annulée par la suite.
Le Championnat en partenariat avec Seat
En 2004, Guy Janny décidait de mettre sa carrière de pilote entre parenthèses et de se consacrer à celle de son fils, à qui il confiait sa Seat Ibiza groupe A. Une saison d’apprentissage qui permettait à Jérôme de poursuivre sa progression et surtout de prendre énormément de plaisir. En 2005, une Seat Léon Cupra viendra remplacer l’Ibiza, et à son volant Jérôme disputait l’intégralité du Championnat : « Je disposais d’une auto toute neuve, sortie des ateliers de Seat Sport en Espagne, et d’un partenariat avec Seat France pour un projet qui portait sur trois ans », se souvient Jérôme qui découvrait alors des épreuves telles que Bagnols-Sabran, le Col Saint-Pierre ou La Pommeraye.
Le partenariat avec Seat arrivant à son terme en 2008, Jérôme Janny optait pour une Honda Civic, laissait alors par un copain, au fond de son garage. En parfaite osmose avec la petite nippone, Jérôme terminait la saison à la deuxième place du Challenge Espoirs. Finalement il achetait la Honda avec laquelle il prenait part à la saison 2009, avant de sortir de la route à Vuillafans. Contraint de refaire une caisse, il profitait de l’occasion pour passer en F2000, catégorie plus fournie alors en concurrents. En cette année 2010, il prenait part à ses premiers rallyes, avant de se séparer de la Seat pour disposer en 2011 d’une Porsche Cayman avec laquelle il prendra autant de plaisir en côte qu’en rallye.
A l’issue de cette saison 2011, Jérôme Janny décidait de concentrer les saisons à venir sur le rallye. Le point d’orgue de sa saison 2014 restera sa participation au Rallye de France, manche du Championnat du Monde des Rallyes, au volant d’une Skoda Fabia R2. Un moment qu’il qualifiera alors de magique…
En 2015, c’est au volant d’une Honda Civic qu’il faisait son retour sur le Championnat de France de la Montagne, et tout au long de la saison, il dominait totalement la classe N3. En 2016, on retrouvera Jérôme au départ de la Course de Côte de La Broque, du Mont-Dore et de Turckheim, mais c’est de rallyes que sera constitué l’essentiel de son calendrier : « L’objectif était de me qualifier pour la Finale de la Coupe de France des Rallyes. Mais j’ai eu quelques soucis pour mettre au point la Civic et la saison ne s’est pas déroulée comme je l’espérais », confie Jérôme. « Ce n’est qu’au mois de juillet que la voiture commençait à être compétitive. J’avais alors perdu trop de temps pour me focaliser sur mon résultat en rallye, et j’ai donc décidé de prendre part aux Courses de Côte du Championnat que j’apprécie tout particulièrement. »
Retour sur le Championnat avec une Supercopa
La Course de Côte a toujours été la discipline de prédilection de Jérôme qui décidait pour 2017 de s’engager sur le Championnat de France de la Montagne au volant d’une Seat Léon Supercopa. Avec un père concessionnaire Seat depuis plus de trente ans, le choix de la Supercopa peut paraitre logique. Il s’avère qu’en plus la belle espagnole est une arme redoutable en Groupe A : « Ce n’est pas pour autant que je me suis fixé un objectif. Je voulais avant tout cerner le comportement de la voiture, et puis je savais que j’allais devoir faire face à une vraie rivalité, avec des pilotes de talent qui évoluaient également en Supercopa. »
Dans l’esprit de Jérôme Janny, son engagement sur ce Championnat de France de la Montagne 2017 passait par une participation à l’ensemble des épreuves. Pourtant, il ne sera pas présent sur la manche d’ouverture, la Course de Côte de Bagnols-Sabran : « J’avoue que je n’affectionne pas particulièrement le tracé, et l’accident de Steve (Cabelo) lors de la précédente édition m’a un peu refroidi. N’ayant jamais roulé avec la Supercopa, je savais que Sabran n’était pas le terrain idéal pour la découvrir. » Ajouté à cela que le même week-end se déroulait le Rallye d’Epernay Vins de Champagne, Jérôme préférait retrouver le volant de la 106 familiale pour aller chercher une deuxième place de classe sur cette épreuve comptant pour le Championnat de France des Rallyes 2ème division.
Le tracé du Col Saint Pierre allait être le théâtre de la première participation de Jérôme avec sa Supercopa, sur une épreuve qu’il n’avait plus eu l’occasion d’affronter depuis 6 ans : « C’est de plus la manche du Championnat que j’ai le plus de mal à assimiler », reconnait-il. « J’ai eu du mal à me remettre dedans mais au final, terminer troisième du groupe derrière Rémi Bernard et Francis Dosières, c’est loin d’être un mauvais résultat. Je n’étais pas très loin de Francis, alors que je roulais avec de vieux pneus, ce qui me semblait prometteur pour la suite. »
Une suite qui aura lieu à Abreschviller où Jérôme plaçait sa Seat à la deuxième place du Groupe A, à seulement quatre dixièmes de secondes de Francis Dosières : « Je roulais toujours avec des gommes usagées, je ne chausserai des pneus neufs qu’à partir de La Pommeraye », précise Jérôme. « Dans ces conditions, je peux m’estimer satisfait de ma prestation, d’autant que j’ai perdu du temps avant de négocier correctement l’épingle. Dans mon esprit, une Supercopa ne braquait pas. Je me suis donc obstiné à tourner le plus large possible durant l’essentiel du week-end, ce qui fait qu’à l’issue de la deuxième montée de course, je pointais à la sixième place du groupe. Sur la dernière, je me suis dit que je n’avais rien à perdre et j’ai coupé au plus court. Finalement c’est passé, et j’ai donc cravaché pour être le plus rapide possible jusqu’en haut. J’avoue que je ne m’attendais pas à terminer deuxième. »
S’il termine à nouveau sur le podium du groupe A à Thèreval où on retrouve Jérôme à la troisième place, il prenait conscience à l’issue de l’épreuve normande, que pour jouer la gagne il fallait impérativement qu’il chausse sa Léon de gommes neuves : « J’ai même failli me sortir sur la dernière montée tellement mes pneus étaient au bout. Donc tant pour une question de sécurité que de performances, il fallait que je dispose de pneus neufs. »
Premiers succès à La Pommeraye
Equipée de gommes neuves, la Supercopa pouvait affronter le tracé de La Pommeraye dans les meilleures conditions. Et Jérôme n’allait pas louper ce rendez-vous sur lequel il place sa Seat au neuvième rang, signant par la même occasion sa première victoire de groupe de la saison, 946 millièmes devant Francis Dosières : « C’est une course que j’apprécie et je pensais que sur ce tracé typé circuit, il y avait la possibilité de faire de belles choses avec la Léon. Je me suis vraiment fait plaisir et j’ai passé un super week-end. Je pensais sincèrement en début de saison que s’il y avait un tracé sur lequel je pouvais éventuellement viser la victoire, c’est celui de La Pommeraye, et ça s’est confirmé. »
C’est à nouveau en devançant Francis Dosières, cette fois de quatre dixièmes, que le Lorrain remportait une nouvelle victoire de groupe à Saint Gouëno : « Ce fut pour moi une grande surprise car c’est une épreuve que je ne connaissais pas. Samedi j’avoue avoir eu du mal à trouver mes marques. Mais dimanche, sous la pluie, j’étais plutôt bien, car si Francis jouait devant sur les deux premières montées, j’étais en bagarre avec Seb Dupont. Sur la dernière, le tracé commençait à s’assécher et j’avais chaussé les slicks. Mais quelques gouttes ont fait leur apparition alors que j’étais en prégrille. Dans mon esprit c’était fini pour moi, mais j’ai tout de même voulu jeter toutes mes forces dans la bataille. J’ai pris un très bon départ, mais dans le deuxième droite, je me suis fortement appuyé sur le rail et je me suis dit ’’c’est vraiment fini’’, mais j’ai continué malgré tout à garder le pied dedans. Finalement ça paie, puisque je l’emporte pour quatre dixièmes », commente Jérôme. « Je n’avais aucun espoir de signer un bon résultat sur cette épreuve que je découvrais, la satisfaction est donc d’autant plus grande. »
Marchampt sera le théâtre d’une belle confrontation entre trois animateurs du Groupe A. Francis Dosières, Rémi Bernard et Jérôme Janny vont une nouvelle fois s’affronter pour se partager les places sur le podium. A l’heure de faire les comptes, c’est Francis Dosières qui grimpe sur la plus haute marche. Jérôme pointe pour sa part à 4 dixièmes du vainqueur et à seulement 95 millièmes de Rémi qui place sa Seat au deuxième rang : « Là j’avoue que j’étais un peu déçu, parce qu’avec mes victoires sur les épreuves précédentes j’avais un peu revu mes objectifs à la hausse. En fait, j’ai très mal roulé lors des essais, et je pense que c’est ce qui m’a coûté une meilleure place en course. Il ne fallait pas rater la montée du matin sur laquelle la plupart des concurrents signent leurs meilleurs chronos, et sur celle-là je n’ai pas été bon. Je ne peux m’en vouloir qu’à moi-même. »
Afin de mieux cerner le comportement de sa voiture, Jérôme décidait alors de chausser sa Seat de gommes neuves dès les essais. C’est ce qu’il fera à Vuillafans où l’attendait une nouvelle confrontation au sommet : « Là j’étais content de mes essais et dimanche matin je fais une bonne montée. La deuxième, sous la pluie, n’a pas été d’une grande utilité, mais sur la dernière disputée sur le sec, j’ai vraiment bien roulé et je pensais sincèrement avoir amélioré. Mais au final le chrono est moins bon que le matin, et Francis reste devant pour 137 millièmes. C’est le jeu, et je n’ai rien à regretter car j’ai vraiment fait ma course et que la bagarre fut belle. »
A l’issue de Vuillafans, dans l’esprit de Jérôme Janny le Championnat était plié. Il lui paraissait alors impossible de prétendre à un Trophée de Groupe, alors qu’il comptait un déficit de points qu’il considérait comme important. De plus, la prochaine manche se déroulait à Dunières, épreuve sur laquelle il reconnait ne pas être à son aise. Mais contrairement à ce qu’il présumait, ses résultats en Auvergne vont changer la donne. Tout d’abord à Dunières où, neuvième au scratch, il remportait un nouveau succès de groupe : « Là je pensais être largué. Pour tout dire je ne voulais même pas y aller, et ce n’est que parce que l’un de mes partenaires est basé à Saint Etienne que j’ai tenu à être présent », confie Jérôme. « Samedi, ce que je pensais s’est confirmé. Je n’étais pas du tout dans le coup et je savais que le résultat ne serait pas au rendez-vous. Dimanche, sur la première montée j’assure le minimum vital pour accrocher la troisième place, et je ferai de même sur la suivante, en réduisant l’écart sur ceux qui me précédaient. »
Jérôme comprend alors que s’il n’est pas dans le coup, c’est parce qu’il se focalise sur le premier droite, dans lequel, lors de précédentes éditions, il a été victime de tête-à-queue : « Et je me suis dit, tant pis, tente le et rentre dedans. C’est passé… et à partir de là je me suis dit, ne lâche rien jusqu’en haut. J’ai bien fait puisque finalement je l’emporte. C’est vraiment une méga surprise. »
La réussite se poursuivait sur le Mont-Dore où Jérôme Janny signait son meilleur résultat de la saison en plaçant sa Seat à la cinquième place du scratch et en devançant Rémi et Francis de près de trois secondes : « C’est la seule course de l’année où j’ai pointé en tête des essais jusqu’à la dernière montée de course. Il faut dire qu’autant je ne croyais absolument pas à mes chances à Dunières, autant je voulais remporter le Mont Dore. Je viens sur cette épreuve depuis l’âge de 4 ans, mes parents ont un chalet dans le coin et j’adore cette région où je viens en vacances régulièrement tout au long de l’année. De plus j’adore ce tracé que je connais par cœur. J’ai roulé sans me poser de questions, et je suis vraiment heureux du résultat. »
C’est par une nouvelle victoire de Groupe que se concluait la Course de Côte de Chamrousse, où Jérôme s’imposait devant Francis Dosières : « Ce genre de parcours large, typé circuit, me convient parfaitement. La performance du Mont-Dore me met en confiance et au fil des épreuves j’ai le sentiment de progresser. Donc là ça s’est vraiment bien passé, d’autant que c’est la première fois que ma fille de 6 ans venait sur une course, et quand tu arrives en haut et qu’elle te demande si tu as gagné et que tu peux lui répondre ’’oui’’, ça reste quelque chose de vraiment sympa. »
L’enchainement des victoires laissait entrevoir une possibilité pour Jérôme de reprendre la tête du Challenge et du groupe A au Championnat. Mais le duel livré à Francis Dosières à Turckheim tournera à l’avantage du pilote de Fouchères qui devançait le Lorrain de trois dixièmes : « J’ai vraiment tout donné pour tenter d’être devant, d’autant que j’apprécie particulièrement le tracé de Turckheim. J’avais de bons espoirs et je ne peux pas cacher que je suis un peu déçu d’échouer à la deuxième place. Mais je n’ai pas de regret en ce sens que j’ai vraiment tout donné. »
Jérôme Janny concluait sa saison par un ultime succès, obtenu à Limonest, manche de clôture du Championnat : « Je savais que les positions étaient jouées mais j’ai voulu une nouvelle fois donner le meilleur de moi-même. Cela faisait sept ans que je n’étais pas venu à Limonest, les essais furent donc un peu compliqués. Le dimanche matin je fais le meilleur temps sans être toutefois satisfait de ma prestation. Au final je l’emporte, mais ce n’est pas pour être honnête mon meilleur souvenir de la saison. »
S’il ne remporte pas le Challenge Open A/4 et le Trophée FFSA du Groupe A, Jérôme Janny peut se targuer de s’être imposé à six reprises cette saison et de compter donc un nombre de victoires plus important que ses adversaires : « Pour moi le bilan est largement positif. Je suis juste pénalisé par mes résultats en demi-teinte du début de saison, alors que je découvrais la voiture et que je roulais avec de vieux pneus. Mais pour le reste, tout s’est idéalement passé. Je ne pensais pas être en mesure de me battre avec Francis et Rémi, même si j’espérais me rapprocher d’eux. Parvenir à les devancer sur plusieurs épreuves est au-delà de mes espérances, et je veux avant tout retenir que nos confrontations se sont déroulées dans une excellente ambiance tout au long de la saison. »
A l’heure de tourner la page de la saison 2017, Jérôme tient à remercier ses soutiens : « Je voudrais remercier mon père qui me suit toujours dans mes projets. Ma mère qui suit toujours de loin, mais qui cette année a fait le déplacement sur plusieurs épreuves. Ma compagne Coralie et ses parents, Jean Marc et Nicole. Bertrand, Gugu, Ulrich, Jérôme. Mes partenaires Igol, S&C peinture, Seetp, Autovision à Revigny Sur Ornain, P Tabacchini, Urban TV, ABI électricité, Sarteler Peinture. Merci également à mes adversaires du groupe A avec qui j’ai passé une superbe saison. Et toutes les personnes qui m’ont soutenu, encouragé et félicité. »
Si 2017 était une saison d’apprentissage pour Jérôme Janny, 2018 sera abordée comme celle de la concrétisation : « Je vais repartir pour une saison complète au volant de la Seat avec comme objectif de viser le titre en Groupe A. J’espère que la saison se déroulera pour moi sans encombre et que nous aurons une vraie concurrence car c’est toujours plus sympa et motivant de se battre avec des adversaires de poids. »
Propos recueillis par Bruno Valette