C’est à l’heure où de nombreux pilotes songent à la retraite que Jean-Jacques Louvet a débuté dans le sport automobile. Une approche très ludique de la part de ce gentleman driver, qui n’a d’autre préoccupation que de se faire plaisir en partageant sa passion avec sa fille, Sarah. L’entrepreneur lyonnais a vécu une saison 2015 riche en émotion, qui le conforte dans ses choix, et l’incite aujourd’hui à repartir plus motivé encore pour la saison à venir.
L’automobile a toujours suscité un vif intérêt chez Jean-Jacques. De sa jeunesse parisienne, il lui reste le souvenir de belles mécaniques croisées sur les boulevards de la capitale. Mais l’Ile de France n’offre que de rares occasions de découvrir des voitures de courses dans leur environnement habituel. De ce fait, Jean-Jacques Louvet restait très éloigné de la compétition.
Dans les années 80, Jean-Jacques quittait Paris pour débuter une nouvelle vie dans la région lyonnaise. L’opportunité pour lui de découvrir les épreuves organisées aux environs de la capitale des Gaules. Mais là encore, entièrement impliqué dans une vie professionnelle lui laissant peu de loisirs, Jean-Jacques ne disposait pas du temps nécessaire pour assouvir une quelconque passion liée au sport automobile.
Spectateurs, puis acteur
Mais au début des années 2010, alors qu’il était propriétaire d’une vieille Citroën, Jean-Jacques confiait quelques nécessaires réparations de sa voiture à une agence de la marque aux Chevrons. Au sein de cette agence, travaillait Sébastien Chabin : « Ce fut l’occasion de faire connaissance, de discuter sport automobile et de de devenir amis », explique Jean-Jacques. « C’est un des animateurs les plus talentueux des épreuves régionales, et je n’ai pas manqué d’aller suivre ses prestations sur les courses de ma région d’adoption. »
Sa présence sur les courses de côte permettait à Jean-Jacques Louvet de côtoyer par la suite Alain Perraud, Daniel Coquet, Jérôme Labrosse, Olivier Augusto et d’autres Montagnards plus acharnés les uns que les autres : « Au fil des discussions, ils ont fini par me demander pourquoi, au lieu de rester au bord de la route, je ne viendrais par courir avec eux. » Le chef d’entreprise lyonnais avait alors le sentiment de n’être plus en âge de débuter une carrière de pilote : « Ils m’ont convaincu du contraire, et cela a été un pari. Olivier Augusto m’a proposé sa Formule Renault pour que je puisse mener à bien des essais sur le Circuit du Bourbonnais. »
Durant trois sessions, Jean-Jacques allait accumuler les tours sur la piste pour se familiariser avec le comportement d’une auto de course : « Mais je n’y comprenais rien. Pendant 40 ans je n’ai conduit que des voitures ’’civiles’’, et là je me retrouvais dans un environnement que je ne maîtrisais absolument pas. » L’accumulation de tête-à-queue et d’erreurs de pilotage n’incitaient pas Jean-Jacques à poursuivre, et sans l’insistance d’Olivier Augusto, il aurait certainement renoncé. « Finalement, je suis parvenu à trouver quelques marques et, chose essentielle, à me faire plaisir au volant. »
Conscient qu’il ne pouvait pas lui apporter beaucoup plus, Olivier Augusto incitait Jean-Jacques à se tourner vers les mains expertes de Nicolas Schatz. Après quelques conseils avisés du multiple Champion de France, Jean-Jacques acceptait le pari osé, de s’élancer pour sa toute première course, sur le tracé de Chamrousse au volant d’une Tatuus F.R. A 65 ans passés, Jean-Jacques découvrait un nouvel univers et n’allait pas manquer de tomber sous le charme de la discipline. Trois autres courses (La Mure, Saint Savin et Limonest) allaient constituer son calendrier 2013.
Onze courses au volant d’une Norma en 2014
Les épreuves disputées en 2013 faisait prendre conscience à Jean-Jacques Louvet que la Formule Renault n’était pas vraiment adaptée à son gabarit. Loin de renoncer pour autant, il décidait alors de changer de monture : « Olivier (Augusto) m’a aidé à chercher une auto qui, selon lui, me conviendrait mieux. Nous avons dégoté une Norma, ayant appartenu précédemment à Geoffrey (Schatz), et au volant de laquelle je me suis rapidement senti à mon aise. »
Au volant de cette Norma, Jean-Jacques s’engageait sur de nombreuses épreuves régionales, mais sera également présent à la Pommeraye, Saint-Gouëno, le Beaujolais, Dunières et Chamrousse. Ce ne sont pas moins de onze épreuves qui étaient inscrites à son calendrier.
En 2015, Jean-Jacques intégrait le Team Schatz Compétition pour disputer l’ensemble des épreuves du Championnat de France de la Montagne. L’objectif était alors d’accumuler le maximum de kilomètres pour accroitre son expérience et se familiariser avec les tracés de notre championnat : « Olivier (Augusto) avait décidé de se tourner en partie vers le circuit. Désireux de poursuivre en course de côte, je me suis rapproché de Nico qui pouvait prendre en charge ma voiture. »
Jean-Jacques ne sera pas seul à rejoindre le team du Champion de France, il était accompagné de Sarah, sa fille, chez qui Nicolas Schatz avait rapidement décelé un énorme potentiel. Père et fille allaient vivre une fabuleuse expérience, en partageant une passion commune au sein d’une structure qui allait rapidement devenir une seconde famille : « J’avais l’espoir de rester devant Sarah, mais la jeune génération ne respecte plus les anciens », confie-t-il dans un éclat de rire. Car si à Bagnols-Sabran Jean-Jacques parvenait à devancer sa progéniture, par la suite, il lui sera impossible de suivre le rythme imprimé par Sarah : « ’’Ta fille, tu ne la reverras plus’’, m’avait alors dit Bruno Schatz, qui savait pertinemment que je ne serais plus en mesure de la devancer. »
Il est vrai que le père et la fille ont une approche assez différente de la compétition. Compétitrice dans l’âme, Sarah ne lâche jamais rien, et a démontré durant cette saison 2015, non seulement de vrais talents de pilote, mais également une pugnacité qui a fait douter ses adversaires les plus aguerris. Jean-Jacques reconnait pour sa part aborder la course en dilettante, avec comme seule motivation de se faire plaisir : « On est vraiment différent à ce niveau-là. Elle est réellement concentrée, elle travaille énormément ses courses, alors que moi j’ai beaucoup plus de mal à prendre les choses aux sérieux. »
2015, la saison du plaisir
Pour débuter cette saison 2015, Jean-Jacques Louvet allait se confronter à un tracé qu’il découvrait, celui de Bagnols-Sabran : « J’ai bien aimé, même si je reconnais que c’était compliqué. J’avoue que le croisement situé juste avant l’arrivée m’a donné quelques soucis. Mais le parcours est grisant. »
La saison de l’entrepreneur lyonnais se poursuivait sur le Col Saint-Pierre, un gros morceau pour un pilote qui n’avait jamais eu l’occasion d’arpenter le tracé gardois : « Les deux premiers kilomètres ne m’ont pas posé de problèmes, mais j’ai eu du mal à assimiler le haut du parcours. Tout se ressemble, et pour moi qui ai du mal à mémoriser, ce ne fut pas évident. »
Le court tracé d’Abreschviller allait nettement mieux convenir à Jean-Jacques, qui assimilait rapidement le parcours de l’épreuve lorraine : « J’ai beaucoup aimé, ne serait-ce que parce que le tracé s’apparente à ce que l’on trouve en régional. De plus, l’organisation est vraiment au top, et l’accueil particulièrement chaleureux. »
Si Jean-Jacques a apprécié le tracé d’Hébécrevon, en revanche il n’a que modérément prisé le comportement de sa Norma durant ce week-end normand : « J’ai eu des soucis de déjaugeage, et je n’ai pu prendre part qu’à une seule montée de course. Je le regrette d’autant plus que j’ai bien aimé ce tracé, qui propose une portion étroite entre les rails avant de déboucher sur un secteur plus rapide. Là encore, l’accueil est excellent. »
Le problème de déjaugeage avait déjà alerté Jean-Jacques à Abreschviller, avant de le pénaliser à Hébécrevon. C’est apparemment un souci de masse qui était à l’origine de ses ennuis, et le problème allait devenir récurrents avant que Bruno Schatz ne parvienne finalement à le résoudre : « Ce n’était pas simple pour parvenir à comprendre ce qui le provoquait », se souvient Jean-Jacques.
Mais au moment de rejoindre La Pommeraye, le problème n’était toujours pas solutionné : « Ce qui amène un sentiment de frustration car je ne savais pas si je pourrais aller au terme du week-end. C’est dommage, car je disposais d’une bonne auto. » Malgré tout, le Lyonnais d’adoption allait connaitre un meeting angevin qui lui laisse d’excellents souvenirs.
C’est avec la pluie que Jean-Jacques devait composer à Saint-Gouëno. Des conditions climatiques qui ne le gênaient pas outre-mesure : « Je ne suis pas un pilote très rapide sur le sec », reconnait-il en toute humilité. « Pour moi, il n’y a donc pas de gros écarts dans mes chronos entre une montée sur route sèche et une montée sur un revêtement humide. Finalement, les conditions m’avantagent plus qu’elles ne me pénalisent. » Pour ce qui est de la course elle-même, Jean-Jacques ne cache pas son affection : « C’est très bien organisé, nous sommes très bien reçus, et un passage comme celui du ’’Fer à Cheval’’ est quelque chose de très sympa. »
Toujours en proie à des soucis électriques à l’origine de déjaugeages, Jean-Jacques ne pouvait profiter pleinement de sa participation à la Course de Côte des Beaujolais-Villages : « Pour être honnête, ce n’est pas l’épreuve sur laquelle je suis le plus à mon affaire. Les parties rapides ne me posent pas de problème, mais sur les portions plus techniques, je n’ai pas suffisamment de maîtrise pour exploiter pleinement la voiture. Je peux le regretter car cette course est vraiment magnifique. »
La Course de Côte de Vuillafans sera certainement le rendez-vous le plus difficile de la saison pour le pilote de la Norma. La canicule qui s’abattait sur la Franche-Comté fera souffrir hommes et mécaniques, mais affectera également le revêtement : « C’était compliqué pour moi. Il était difficile d’être en confiance dans ces conditions. Je dois reconnaitre que j’ai encore du mal dans l’approche des courbes à l’aveugle », avoue Jean-Jacques. « Je sais ne pas être un hyper rapide, mais je n’avais pas l’impression de me traîner. Alors quand j’ai vu qu’au final Sarah me devançait de sept secondes, j’avoue avoir pris une petite claque. » Une déception largement compensée par la fierté de voir sa fille s’illustrer, en jouant les premiers rôles du côté des Formule Renault : « Elle termine à une seconde d’Antoine (Betzel) qui est un pilote très rapide, qui jouit d’une longue expérience. J’avoue que là, elle m’a bluffé. »
C’est certainement un manque de concentration qui sera à l’origine de la sortie de route de Jean-Jacques Louvet sur la Course de Côte de Dunières : « J’avais le sentiment que le virage était plus loin, et j’ai retardé mon freinage. C’est une erreur qui m’obligera à renoncer dès la première montée de course. » Si la carrosserie ne laissait entrevoir que de légers stigmates de la touchette, la triangulation avant-droite avait subi en revanche des dégâts plus conséquents. La Norma retrouvait le garage et, privé de monture, Jean-Jacques se rendait au Mont-Dore pour assister à la course en spectateur.
A Chamrousse, Jean-Jacques retrouvait un tracé qu’il avait eu l’occasion d’affronter précédemment au volant d’une Formule Renault, et de sa Norma : « J’apprécie le parcours, même si je redoute un peu la portion, à mi-parcours, qui propose une série de virages. Mais c’est un beau tracé, exigeant par endroits. »
Pour Jean-Jacques, la saison dans le cadre du Championnat de France de la Montagne s’achevait à Turckheim : « C’est une très belle course, que j’apprécie vraiment et sur laquelle nous sommes très bien reçus. Je découvrais le tracé, et vraiment ça m’a bien plu. Ça me laisse un excellent souvenir pour la conclusion du championnat. »
Cette saison 2015 a offert à Jean-Jacques l’occasion d’engranger également de bons souvenirs en dehors du championnat. Ce fut le cas à Donzy le Perthuis où on le retrouvait au mois de mai ou à Courpières le mois suivant : « Courpières est une épreuve très courte, mais vraiment sympathique. » A Laussonne, Jean-Jacques plaçait sa Norma au huitième rang, mais était devancé par Sarah qui signait le sixième temps scratch : « Marc Habouzit, l’organisateur, fait une super boulot et cette course de Laussonne est toujours superbement organisée. Sarah signe une performance de tout premier ordre en terminant première féminine et en établissant un nouveau record de la piste en F.R. J’en garde bien évidemment un excellent souvenir. »
Toujours accompagné de Sarah, Jean-Jacques allait conclure la saison sur la Course de Côte du Circuit de Bresse : « C’est avant tout un rendez-vous festif. On se retrouve là pour marquer la fin de saison et l’environnement étant totalement sécurisé, on pense avant tout à se lâcher et à s’amuser. C’est très bien organisé, et vraiment plaisant. »
Sarah et moi, nous courrons dans d’excellentes conditions
S’il avoue qu’il aurait bien aimé être un peu plus rapide tout au long de cette saison 2015, Jean-Jacques Louvet se dit malgré tout très satisfait : « Ces dernières saisons en course de côte m’auront permis de partager ma passion avec Sarah, tout en évoluant au sein d’un team où règne une excellente ambiance et où la rivalité n’a pas sa place entre pilotes. » Nicolas Schatz n’est pas étranger à ce climat, il a la réputation de savoir insuffler une véritable émulation entre les pilotes qu’il coache. « On court dans les meilleures conditions, en sachant disposer d’autos parfaitement préparées et en bénéficiant des conseils d’un coach qui a largement démontré ses compétences. »
Pas question pour Jean-Jacques Louvet de s’arrêter en si bon chemin. Pour 2016, c’est au volant d’une nouvelle monture qu’il disputera le championnat : « J’ai racheté la Norma M20F version 2007 d’Olivier Augusto. La voiture était en configuration circuit, mais Olivier a reconditionné l’auto pour la côte. Je vais disposer d’une auto au top, et pour la première fois du ’’paddle shift’’ qui me permettra de passer les vitesses au volant. » Côté calendrier, Jean-Jacques devrait être au départ de l’ensemble des manches du Championnat de France, s’engager sur cinq ou six épreuves régionales et prendre part à la Course de Côte d’Urcy comptant pour le Championnat 2ème division.
C’est à nouveau au sein du Team Schatz Compétition que Jean-Jacques Louvet abordera la saison à venir, et s’il tient à remercier son coach, c’est vers celui qui fut à l’origine de son arrivée dans la discipline que vont tout d’abord ses pensées : « Un grand merci à Olivier Augusto, sans lui je n’aurais sans doute jamais mis les pieds dans une voiture de course. Il fut également à l’origine des débuts de Sarah, puisque c’est lui qui lui a confié sa Mitjet pour qu’elle puisse disputer ses premières courses. Nous avons été encadrés par Olivier Augusto, puis par Nicolas Schatz, difficile de rêver de mieux. Ce sont des garçons qui font preuve d’énormément de pédagogie, en sachant cerner nos limites et en nous faisant franchir des étapes pas à pas, en fonction de nos aptitudes. »
« Je tiens à remercier l’ensemble des membres du Team Schatz Compétition. Plus qu’une équipe, c’est avant tout une famille où tout le monde s’entraide et se respecte. C’est extrêmement agréable de courir dans de telles conditions », poursuit Jean-Jacques. « Merci à Global Hydro, au Garage Montbel situé à Brignais, à Philippe Houel de Phega Compétition, à Marc Fanciullo MF Power. Un grand merci aussi à Seb, et Alain qui sont toujours un peu derrière moi dans les moments – très courts ! – de découragement. Et bien évidemment je ne peux pas oublier ma fille, Sarah, nous sommes très complices, et j’ai la chance extraordinaire de partager cette nouvelle passion avec elle. »